Extrait du journal

En dotant, par exemple, une ville d’eau potable amenée à grands frais, en ouvrant des hôpitaux, en créant des voies nouvelles, en renouvelant de fond en comble l’outillage commun, on ne fait pas une œuvre égoïste dans l’intérêt d’une génération, et ceux-là qui sont ap pelés dans l’avenir à recueillir le béné fice de tant d’efforts peuvent bien à leur tour verser leur part contributive. Assurément l’idéal, pour une ville comme pour un particulier, serait de ne pas recourir à l’emprunt; il vaudrait mieux trouver dans les coffres-forts ou dans les portefeuilles de quoi subvenir à tous les besoins, à toutes les dépenses, de quelque nature qu’elles soient. En matière d’administration munici pale, ce serait le merle blanc; il arrive parfois, de temps à autre, que les excé dents, les plus-values budgétaires per mettent d’engager et de payer les opéra tions de voirie, c’est-à-dire des travaux extraordinaires au premier chef. Paris a offert ce spectacle, il y a une dizaine d’années ; on croyait pouvoir à la fois dégrever les droits sur les vins et se passer de l’emprunt pour cons truire des voies nouvelles; celte illusion ne fut pas de longue durée. Tant qu’une ville est en état de trans formation, tant qu’elle n’est pas pourvue de tous les organes dont elle a besoin pour la santé, pour le bien-être, pour la sécurité de ses habitants; tant qu’elle n’a pas atteint un certain degré de perfection, il n’y a pas moyen d’interrompre les dé penses de premier établissement, de fixer le budget des grands travaux. Est-ce que personne oserait soutenir sérieusement que Paris pourrait se pas ser des ressources extraordinaires des tinées à améliorer l'alimentation en eau salubre ou bien à porter l’air et la lu mière dans des quartiers malsains ? Et les écoles à construire, les hôpitaux à édifier, les égouts à terminer, est-ce que toutes ces dépenses d’outillage ne s’im posent pas, sous peine de mettre obsta cle à l’expansion et à la prospérité de la Ville ? Il est de toute nécessité que, par tel ou tel moyen financier, par les procédés les moins coûteux et les plus économiques, la Ville de Paris se ménage les ressour ces qui lui permettent de réaliser le programme de grands travaux dont il est impossible do contester le principe et de méconnaître l’urgence. L’an dernier, le conseil municipal avait à sa portée un moyen devant le quel il a reculé; il n’a pas osé faire la conversion de sa dette, et il s'est privé d'une ressource annuelle de huit à dix millions qui aurait pu être le gage d’un emprunt nouveau. Aujourd'hui, la Ville est dans l’obli gation de rechercher des ressour ces extraordinaires aussi bien pour l'a chèvement de la rue Réaumur lié à la construction du Métropolitain, que pour des opérations de voirie indispensables et pour l’assainissement, et la nécessité d’un emprunt direct ou indirect éclate à tous les yeux. Il ne faut ni s’en étonner ni s’en alar mer; la transformation de Paris n’est pas près d’être achevée et les contempo rains auraient bien tort de se saigner aux quatre veines pour leurs succes seurs; ils ont été suffisamment imposés depuis vingt ans, grâce- à l’héritage de...