Extrait du journal
IV 1 Bon ! voilà Boulange qui parle du Tonkin ! Sur son affiche de ce matin, il dit que c’est les Tonkin s qui préparent les Sedans. Fameuse, cette idée-làJ Seulement, Gavroche trouve qu’elle vient un peu tard. Est-ce que je me trompe? Est-ce qu’il n’y a pas eu un ministre de la guerre, nommé Boulanger, qui, pendant dixhuit mois, a consciencieusement pris sa part de la conquête du Tonkin? Les troupes qui sont allées là-bas re lever les camarades, pendant qu’Ernest se gobergeait rue Saint-Dominique, qui donc les envoyait au loin, s’il vous plaît? — Ernest lui-même. L’argent qu’on dilapidait alors — c’est l’affiche qui le dit — pour cette expédi tion lointaine, où le prenais-tu, Boulan ge? On ne t’en envoyait pourtant pas encore de l’étranger ! Faut donc croire que tu l’empruntais à ton budget. Mais alors, mon vieux, c’est toi qui as ruiné la France ! G’est toi qui as défait notre armée! G’est toi, entre autres, qui es responsable du mal causé par les en treprises coloniales. Pourquoi que t’as pas protesté quand t'étais ministre, dis? Pourquoi que t’as pas refusé ton ar gent et tes hommes? Ç’aurait été beau, tu sais, de voir le chef de l’armée descendre du pouvoir pour ne pas s’associer à une politique néfaste, comme on dit chez Laguerrc ! Ç’aurait été crâne de te voir renoncer à tout, aux honneurs et à l’argent, pour faire comprendre au peuple que ceux-là le servaient mal qui gaspillaient ses forces ! Trop tard, maintenant, le tonnerre! C’était quand ça t’aurait coûté quel que chose qu’il fallait t’indigner. Main tenant, tu espères que ça te rapportera, et, alors, en avant la musique! Tu crois donc les Parisiens bien bêtes, mon pauvre Boulange, pour te figurer qu’ils ont oublié ta présence à la revue où les soldats de Dominé ont défilé sur la pelouse de Longchamps? Tu as bien fait tout ce que tu as pu, ce jour-là, pour escamoter une partie de leur gloire. Tu ne protestais pas contre le Tonkin, alors ! Tu te contentais de priver le brave Négrier du plaisir bien mérité de paraître à la tête de ses soldats. Tu le laissais tout seul, en bourgeois, dans la foule, pendant que tu paradais sur ton cheval noir, toi qui n’avais rien fait. •. ^ C’est petit, Boulange, ce que t’as fait là 1 Et ce que tu fais aujourd’hui, c’est lâche LGAVROCHE*...
À propos
Fondé en 1881 par Charles Laurent, Paris fut d'abord un quotidien gambettiste, avant de devenir tout simplement opportuniste. En 1888, le journal attaque avec violence le Crédit Foncier, lequel le rachète immédiatement dans le seul but de le faire taire. À la suite de quoi le directeur du journal démissionne, pour fonder Le Jour. Le nouveau directeur Raoul Cavinet, d'une moralité douteuse, sera impliqué dans les années qui suivent dans plusieurs affaires de chantage et de fraude. Il abandonnera son poste, et le titre avec lui, en 1895.
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