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Paris, 27 janvier 1883

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Paris
27 janvier 1883


Extrait du journal

Mais enfin, dites vous, nous les expul sons et la frontière est garnie de doua niers et de gendarmes, qui arrêteront la contrebande monarchique. — Erreur ! Vous ne confisquez pas, cela va sans dire, les biens de la famille d’Orléans, ni ceux de la famille Bonaparte, ni ceux de la branche aînée. Ces biens auront des administrateurs, des intendants, des gérants. Ces intérêts considérables, (bêlas ! nous en savons quelque chose), ne vont pas rester sans régisseurs. M. Bocher surveillera les uns, M. Brunet les autres. Ne voyez-vous pas que la porte restera ouverte, sinon à la personne des princes, du moins à leurs écus ? Votre projet, si sévère cependant, sera parfaitement impuissant à entraver une action de propagande quelconque. Il a pour lui d’être odieux, il n’a pas pour lui d être utile. C’est que vous vous êtes mépris sur la véritable tendance de l’opinion républi caine et sur les véritables droits de la démocratie. Oui, la République a le droit de se défendre, et il faut qu’elle sc défende; mais d’abord il ne faut pas qu’elle se débatte à tort et à travers contre des dangers imaginaires, et ensuite, si elle est obligée de lutter, il faut qu’elle em ploie des moyens sûrs et décisifs. Eli bien, voyez comment vous venez de traiter les anarchistes coupables d’a voir répandu des doctrines subversives, mais contre lesquels vous n’avez pu relever aucune complicité directe — le jugement n’a parlé que de complicité morale — dans les attentats de Montceau-les-Mines et de Lyon. La prison, la réclusion, la surveillance de la haute police, la privation des droits civils et politiques, l’amende, — toutes les répressions, excepté la mort, sont employées contre ces individus sans fortune, sans armée, sans clients. Et lors que vous dites avoir devant vous des princes décidés à combattre la Républi que, possédant des ressources immenses, une clientèle d’officiers, des châteaux, des amis, des lieues de pays, des allian ces royales et tous les moyens d’action que donnent de grands commandements militaires longtemps exercés, vous déci dez, quoi ? — Vous décidez de les ren voyer avec toutes leurs forces morales et la presque totalité de leurs forces maté rielles de l’autre côté d’une ligne idéale qui marque les limites de la France. Et vous vous figure* que vous êtes à l’abri ? A l’abri ? — Oui, comme les autru ches ! Car rien n’empêchera ces princes de recommencer, hors do l’atteinte de vos gendarmes, toutes les tentatives dont l'exécution était, ici, bien plus difficile. En somme, pour un anarchiste, la prison et la ruine ; pour un monarchiste, la fortune et l’impunité. Vous humiliez des Français en les empêchant d’être soldats, vous les désespérez en les arra chant à la patrie, mais vous ne les désarmez pas, ce qui est une faute....

À propos

Fondé en 1881 par Charles Laurent, Paris fut d'abord un quotidien gambettiste, avant de devenir tout simplement opportuniste. En 1888, le journal attaque avec violence le Crédit Foncier, lequel le rachète immédiatement dans le seul but de le faire taire. À la suite de quoi le directeur du journal démissionne, pour fonder Le Jour. Le nouveau directeur Raoul Cavinet, d'une moralité douteuse, sera impliqué dans les années qui suivent dans plusieurs affaires de chantage et de fraude. Il abandonnera son poste, et le titre avec lui, en 1895.

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