Buster Keaton, l'homme qui ne riait jamais
Le réalisateur et interprète star du cinéma muet est mort il y a cinquante ans. Son art n'avait pas survécu à l'arrivée du parlant.
On le surnommait « l'homme qui ne rit jamais » à cause de son visage impassible. Buster Keaton, né au Kansas en 1895 et mort le 1er février 1966, a été l'une des plus grandes stars du cinéma muet. Il est l'auteur et l'interprète principal de quantité de comédies devenues depuis des classiques : Les Trois âges (1923), Sherlock Junior (1924), Le mécano de la « General » (1927), ou encore Cadet d'eau douce (1928).
Dans le Paris-Soir du 26 décembre 1931, Georges Bateau tentait de définir ainsi la spécificité de son jeu :
« On a tenté de le rapprocher de Charlie Chaplin. Rien n'est plus incompatible que le jeu de ces deux acteurs. Charlot lutte contre la vie mauvaise. Buster Keaton ne lutte pas, il subit tous les chocs de l'existence, sans que son émotion se manifeste le moins du monde. »
Le même journal, le 13 janvier 1932, interroge l'artiste sur le tournage de Buster se marie, film parlant tourné en France et remake du film du même nom sorti un an plus tôt aux États-Unis. Dans l'interview, il tente de défendre un jeu d'acteur minimaliste, comportant le moins de paroles possibles : en vérité, à cette époque, le cinéma parlant a déjà « tué » Buster Keaton, rendant obsolète la mécanique visuelle très spécifique de ses gags.
Dès lors, Keaton est contraint de jouer les seconds couteaux dans des productions dont il perd le contrôle artistique, réservant ses apparitions les plus émouvantes à des films nostalgiques comme Les Feux de la rampe de Chaplin en 1952, où il joue un clown vieillissant, ou interprétant en 1950 son propre rôle dans Sunset Boulevard de Billy Wilder, ode cruelle au vieil Hollywood.