SÉQUENCE PÉDAGOGIQUE CLÉ EN MAIN
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SÉQUENCE PÉDAGOGIQUE CLÉ EN MAIN
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Dans les programmes de l’enseignement secondaire :
Quatrième (L'Europe et le monde au XIXe siècle : L'Europe de la « révolution industrielle »)
Première Générale (L’industrialisation et l’accélération des transformations économiques et sociales en France)
Première technologique (Les transformations politiques et sociales de la France de 1848 à 1870 - la transformation de l’économie et de la société sous le Second Empire, régime autoritaire (industrialisation, urbanisation, essor du chemin de fer)
Première, voie professionnelle (États et sociétés en mutations, Hommes et femmes au travail en métropole et dans les colonies françaises, XIXe siècle - première moitié du XXe siècle)
Classe de Terminale générale, spécialité histoire-géographie-sciences politiques (L’environnement, entre exploitation et protection : un enjeu planétaire)
Introduction
La notion d’environnement est une construction dont l’apparition est fréquemment datée au XIXe siècle. C’est à cette même période qu’est rattaché l’essor spectaculaire de l’industrie, longtemps qualifié de « révolution industrielle ». L’exploitation massive des ressources occasionne des pollutions importantes, et implique des dégradations qui n’ont pas été ignorées. Les prises de consciences liées aux pressions exercées par les humains sur leur environnement sont ainsi perceptibles dans la presse française. Comment les nuisances des industries étaient-elles décrites et perçues dans la presse ? Avec les élèves, il s’agit d’étudier des articles de presse publiés à une période donnée, ici la première moitié du XXe siècle. Cette séquence peut s’intégrer dans une réflexion bien plus large sur l’anthropocène, et croiser le contenu de nombreux enseignements : l’histoire voire la préhistoire mais aussi la géographie ou encore les sciences de la vie et de la Terre.
« La mauvaise odeur des quartiers insalubres, des usines (…) ; L'air des villes qui ne se renouvelle pas suffisamment ou qui est vicié par les fumées des usines est mauvais »
D’après cet extrait de la Revue de l’enseignement primaire de 1922, le contenu d’un enseignement de français destiné aux écoliers du cours élémentaire fait un lien clair entre l’odeur et le caractère néfaste pour la santé de la fumée des usines. Cette connaissance est largement partagée par les élèves d’aujourd’hui, et cette source employée en guise d’accroche leur montre d’emblée que cette prise de conscience est plus ancienne qu’ils ne pourraient le croire.
Qu’elles soient sonores, visuelles ou olfactives, les nuisances occasionnées par l’industrie ont depuis longtemps été constatées et déplorées par les contemporains, mais sous des termes variés. Par exemple, comme le montre l’historien François Jarrige, le terme de pollution se généralise par phases dans la première moitié du XXe siècle, même s’il apparaît dans son acception actuelle dès le XIXe siècle :
« La pollution peut être définie au sens large comme la dégradation d’un milieu par l’introduction de substances ou de radiations, entraînant une perturbation plus ou moins importante de l’écosystème. Cette définition moderne du mot pollution n’apparaît toutefois qu’à la fin du XIXe siècle, les sociétés anciennes privilégiant quant à elles les notions de nuisance, de corruption ou d’insalubrité pour décrire le rejet de déchets ou matières dangereuses dans les milieux. »
Extrait de l'article « Invention médiatique de la pollution » (publié sur RetroNews), par François Jarrige.
Les préoccupations sanitaires sont alimentées par un discours médical aussi relayé dans la presse, longtemps teinté d’hygiénisme.
« Mauvaises odeurs - Les mauvaises odeurs proviennent de la manipulation de matières organiques servant ) préparer des engrais (poussières variées ou autres matières organiques), de certains usines fabriquant du papier, ainsi que de la combustion de déchets.
Combustion de déchets - Certains industriels brûlent jusqu'à 10 tonnes d'arachides, résidus de l'extraction d'huile, d'autres brûlent des feutres, déchets de la fabrication de chapeaux, etc...
Ces déchets dégagent par leur combustion incomplète des odeurs insupportables et produisent une fumée extrêmement toxique (le feutre en particulier contient du mercure provenant de sa préparation).
Il y a donc lieu de défendre l'incinération des déchets sur le territoire de Bordeaux. À noter certaines brûleries de cafés (dont une proche de l'Hôpital Boursier, et de la Faculté de médecine); répandant des fumées opaques, gênantes, du fait du manque de longueur de tuyau de cheminée. Il faudra donc spécifier que les brûleries de café devront posséder un tuyau dont la hauteur devra dépasser de 5 mètres les immeubles, plus hauts situés, environnants.
Odeurs provenant des dépôts de matières ozoniques - Ces odeurs peuvent être détruites soit par condensation dans une chambre par pulvérisation d'eau ; les odeurs se condensant comme les poussières, soit par déposition dans les ateliers et dépôts d'appareils producteurs d'ozone.
L'ozone permettant même la disparition des odeurs des fonderies de suif ; tout le monde sait cependant combien ces dernières sont repoussantes. Le moyen de disparition de ces odeurs existant, il y a tout lieu d'interdire leur production dans l'atmosphère. »
- Extrait de la Gazette hebdomadaire des sciences médicales de Bordeaux du 3 avril 1932
Question :
Quelle est la teneur des explications médicales données en 1932 sur les dégradations de l’environnement causées par l’industrie dans la région bordelaise ?
Ce souci influence largement l’opinion publique, qui s’en soucie par exemple lorsqu’il est question d’une nouvelle installation d’usine.
Question :
En vous appuyant sur l'article du Petit Parisien du 3 avril 1937 titré « Les protestations se multiplient contre le projet d'usine d'incinération des ordures ménagères dans la forêt de Montmorency » : quelles sont les objections soulevées par les riverains autour du projet d’installation d’une usine d’incinération dans la forêt de Montmorency ?
Outre l’agrément et la santé des riverains, il est aussi question dans ce dernier exemple des nuisances de l’usine sur la forêt elle-même - ce qui peut amener les élèves à se poser la question de la prise de conscience des effets sur les milieux, au-delà des effets sur les êtres humains.
La sensibilité aux risques que présentent les industries pour les milieux peut être expliquée de multiples manières et varient selon les périodes et les espaces. L’esthétisation de certains milieux comme la forêt, amplifiée par le mouvement romantique en Europe et trouvant un écho dans la wilderness aux États-Unis, a alimenté un certain souci de préservation des milieux pour eux-mêmes tout au long de la période contemporaine, en valorisant leur caractère sauvage.
Très souvent cependant, c’est surtout l’inquiétude de la destruction et de la disparition des ressources qui a mené au souci de préserver les milieux. Cette peur est particulièrement forte dans les villes industrielles. C’est le cas à Roubaix, dans le Nord de la France, où beaucoup de voix se sont élevées contre la pollution des cours d’eau au temps fort de l’industrie textile.
Au sujet de la surexploitation des forêts pour les besoins des industries, la réflexion qui se déploie dans la presse française s’étend aux forêts du monde entier : l’Europe du Nord, la Russie ou encore les forêts de l’empire colonial.
« Il ne faut pas perdre de vue, en effet, que dans l'Europe septentrionale la forêt intérieure étant inaccessible aux voies de communication, la surexploitation de ses lisières la fait reculer de jour en jour. Le temps est proche où les 75 000 kilomètres carrés de la forêt norvégienne seront diminués de moitié. Quelque rapide qu'y soit la croissance des conifères, l'énorme exploitation de bois d'oeuvre et de pâte de bois menace l'intégrité sylvicole de ce pays où trop de propriétaires forestiers et d'industriels du bois font partie du Parlement pour qu'un législation sévèrement restrictive émane d'eux. Sans doute les forêts impénétrables de la Suède, de la Finlande et de la Russie boréale, dont les possesseurs appartiennent aux classes aristocratiques, résistant plus longtemps à la déforestation des lisières, auront une influence climatique plus longue pour l'Europe et l'Asie ; mais précisément ce qui les garantit de la destruction, - l'impossibilité de les pénétrer, - leur enlève ou diminue pour le monde leur valeur économique.
Ce ne seront donc que les domaines boisés, bien restreints, mais protégés, de la Russie centrale, de l'Autriche-Hongrie, de l'Allemagne, de l'Espagne, de la France, de l'Italie, à peine en tout 100 millions de kilomètres carrés qui demeureront les réserves sylvicoles sur lesquelles s'appuiera l'avenir. C'est donc à les conserver et à les étendre que doivent s'appliquer les législateurs. »
- Extrait de La Revue du 15 novembre 1905
« À ce souci toujours présent d'assurer la protection des hommes et des choses se rattache logiquement le problème du reboisement et de la défense de l'arbre et de la forêt, notamment contre l'incendie.
Malheureusement, les causes sont nombreuses qui constituent des obstacles au développement de la forêt (défrichements inconsidérés, surexploitation, incendies) dont on constate plutôt une régression. La forêt jour dans ce pays un rôle prépondérant comme régulateur du climat et comme réservoir d'eau ; et une "politique de l'eau" doit avoir comme corollaire une "politique forestière".
Tout en tenant compte des prélèvements auxquels il peut être consenti pour les besoins de la colonisation, il importe de protéger nos massifs forestiers dont l'exploitation rationnelle, envisagée à un point de vue purement spéculatif, doit constituer pour le Trésor une source de revenus appréciables. Les résultats obtenus à cet égard au cours de deux derniers exercices sont des plus encourageants : le rendement, qui s'est élevé en 1923 à plus de 12 millions, en excédent de plus de 4 millions sur la moyenne des années précédentes, a atteint près de 19 millions en 1923.
L'Administration ne faillira pas à la tâche que lui imposent la défense et la régénération de ses richesses forestières. Mais il faut aussi que les populations qui vivent en contact avec la forêt comprennent qu'en la respectant et en la défendant, elles servent leur intérêt le plus direct. »
- Extrait de L'Écho d'Alger du 14 mai 1925
Question :
À partir des deux extraits précédents : D’après ces deux articles, quels sont les effets néfastes des déforestations dues aux activités industrielles à l’échelle mondiale?
Conclusion
A partir de cette séquence, les élèves peuvent constater que la prise de conscience de l’anthropisation croissante des milieux est de plus en plus manifeste au fil du siècle. L’observation de changements environnementaux dus à la surexploitation des ressources a amené une évolution des rapports entre les sociétés et leurs milieux. Aujourd’hui cette conscience se renforce, en agrégeant l’avancée des connaissances scientifiques, notamment autour des enjeux du changement climatique.
Pour aller plus loin :
François Jarrige et Thomas Le Roux, La Contamination du monde. Une histoire des pollutions à l'âge industriel, Paris, Seuil, 2017
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Sihem Bella est professeure d’histoire-géographie (Académie de Lille) et travaille sur Alger au XIXe siècle dans le cadre d'une thèse en histoire contemporaine (IRHiS, Université de Lille). Elle est membre de l’APHG (Association des Professeurs d’Histoire-Géographie).
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