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Brid'Oison, 17 avril 1834

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Brid'Oison
17 avril 1834


Extrait du journal

Me voilà libre! et de quoi faire? d’écouter la plainte des mourants, ou de suivre la trace d’un cadavre au long sillon de sang qu’il a laissé derrière lui, en passant du lieu de son supplice improvise au lieu de son exhibition publique, où la sépulture du carcan l’offre aux regrets de sa famille! Me voilà libre! oui, d’entrer à la Morgue, après toutefois en avoir obtenu le permis de la garde qui y représente l’ordre public, et d’y contempler à mon aise le triste fruit du principe social qui nous vaut ce spectacle •> mais non pas libre d’en exprimer mon sentiment tout haut, sam encourir le risque d’ajouter à sa pompe sépulcrale une victime de plus! libre, en sortant de cette récréation, d’aller énumérer de l’oreille et des yeux les trophées et les exploits de la victoire de la se lie. Ils sont écrits de sang humain, sur tous les murs du quartier de. li ville, où cent cinquante malheureux prolétaires, attirés dans le piège de la révolte, ont au moment tenté de soutenir le choc de quarante nulle hommes armés; libre à moi d’insulter à l’aveugle bravoure des vaincus et d’outrager encore ou leur dépouille ou leurs parons par la menace et l’invective; libre à moi d’exalter la magnanimité de leurs quatre-vingt mille vainqueurs. Mais non pas libre à moi d’écouter la voix de l’humanité, en déplorant l’incurable démence des uns, l’implacable cruauté des autres, et l’imbécile acharnement de tous, au risque d’endosser comme eux l’épithète qui donne aujourd’hui la mort!...
Brid'Oison (1832-1834)

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  • france
  • paris