Extrait du journal

Comme tous les amis de Jacques Rainville, je me croyais préparé en quelque chose à apprendre la fatale nouvelle qui nous a frappés le 9 février ; la vivacité même de ma douleur me prouve combien je gardais encore d’espérance. L’âcreté des regrets rend ces premiers moments presque insupportables ; notre âme nous peint toutes les grâces de l’homme que nous venons de perdre ; notre esprit nous retrace ses mérites ; je revois l’ami sûr, le causeur tranquille et clairvoyant, aussi incapable d’être dupe que d’être méchant, puis ces impressions où notre égoïsme survit dans notre chagrin s’effacent de moi, et je considère Bainville non pas seulement dans ce qu’il fut, mais dans ce qu’il continue d’être. S’il y a aujourd’hui comme l’ébauche d’une renaissance de notre pays, si la France semble vouloir assurer sa place dans h monde en revenant aux plus hautes qualités de son génie, Bainville est un des hommes à qui on le doit. Avec quelques autres, savants probes et ombles, il a nettoyé l’histoire de France....