Extrait du journal

pris Dante par la main ; c’était pour elle qu’il lui était doux, c’était elle qui fortifiait le Dante contre les terreurs de l’enfer, c’était elle qui l’instruisait et le réconfortait par la bouche du maître harmonieux mais, à partir du trentième chant du Purgatoire Béatrix intervient directement dans la Divine C(bmedie. Elle ne la remplit pas seulement de son conseil et de son inspiration, elle la remplit de sa présence. Prosterné en esprit devant la divine sa gesse qui l’illumine et le charme à chaque instant (le plus près, Dante a trouvé le dernier terme de son bonheur ; il adore à la fois et la Grâce qui conduit à Dieu, et la femme «pii est pour lui la plus parfaite image de la Grâce prévenante. De vant les hommes et devant les siècles futurs sens le même symbole, il rend témoignage aux vérités de la foi et à la grandeur de son amour. Qui le blâmerait d’être resté fidèle au souvenir de cette belle morte? 11 n’y a plus de Béatrix, il n’y a plus que le nom même de la béatitude donné au plus doux des effets de la bonté de Dieu. Il n’y a plus de Béatrix hu maine, il n’y a plus qu’une Béatrix divine, et à cette Béatrix transfigurée, le poète adresse les plus beaux vers que puisse dicter l’amour confondu dans l’extase « A la naissance du jour, quand tout le ciel était beau de sérénité, j’ai vu quelquefois, sous les teintes rosées de l’Orient, la face du soleil se montrer voilée par des vapeurs qui permettaient aux yeux d’en sup poser l’éclat ; de même, à travers ces fleurs jetées par des mains angéliques, et formant comme un nuage qui remontait et s’abaissait autour du char une femme m apparut. Son front, caché par un voile blanc, portait une couronne d’olivier, un manteau vert couvrait son épaule, et sa robe brillait des cou leurs de la flamme. « Mon esprit, qui depuis si longtemps n’avait été tremblant et frappé de stupeur en sa présence, sans qu u tût besoin de mes yeux pour la reconnaître à je ne sais quelle secrète vertu émanée d’elle, sentit renaître toute la puissance d’un ancien amour. Sitôt que je fis sous I influence de cette vertu souveraine qui, avant la fleur de l’adolescence, m’avait blessé au cœur, soumis comme un petit enfant qui, dans son elîroi ou dans son chagrin, accourt vers sa mère, ic me retournai pour dire à Virgile ; H ne me reste pas dans les veines une seule goutte de sang qui ne frémisse ; je reconnais les signes de mon ancienne flamme. » v Mus si le poète qui vit se souvient d’avoir aimé et s’il aime encore comme aiment les créatures terres tres, la Béatrix transfigurée ne saurait plus avoir un mouvement de faiblesse. Elle est toujours belle et toujours jeune, mais elle est grave et sàeère. Sa pa role, qui est un blâme, fait baisser les yeux au poète-....