Extrait du journal

L'autre jour a passé à l'Hôtel des Vendes, parmi les tableaux d'une collection particulière, un joli panneau de Fragonard, que je ne connaissais pas et qui, à ce que je pense, n'a jamais ét-é gravé. Le peintre y a représenté La Chatte métamorphosée en Femme, d'après la fable de La Fontaine. Tandis que, dans le lit à grands rideaux, surmonté d'une couronne de plumes, le bonhomme de mari, coiffé d'un bonnet de nuit à ruban couleur de feu, regarde la scène avec stupéfaction, sa Femme accroupie, en arrêt, par l'âme du moins devenue Chatte, et montrant tout ce que montrent innocemment les petits chats de Baudelaire, cherche à mettre sa griffe sur les souris épouvantées. Ah ! comme elle a raison, la fable immortelle! Une fois que la nature, l'éducation et les premières années de la jeunesse nous ont pétris d'une certaine façon, il n'y a plus h y revenir, le diable y perdrait ses peines, et, comme dit le grand fabuliste, Le vase est imbibé, l'étoffe...