Extrait du journal

Mistress Daisy Piggett ne se doutait de rien, et comme son mari ne négligeait aucun de ses devoirs, ne l'obsédait pas par des sautes d'humeur, ne 1 entravait pas de remontrances bougonneuses dès qu'elle avait un caprice ou un désir, la laissait à son gré jeter l'argent à mains ouvertes, elle s'ingéniait sans trêve à lui prouver par mille attentions exquises, par de perverses chatteries, par d'enfantines et charmantes surprises combien tout son cœur, tout son être, tout son amour, toutes ses pensées lui appartenaient, combien elle était hantée par le rêve de lui plaire, d'en être aimée chaque jour davantage. Et quoiqu'il en eut, elle arrivait à le griser en quelque sorte, à l'envelopper comme d'un invisible filet, à lui faire perdre par instants complètement la tête et la mémoire, à le secouer de telles jouissances qu'il en demeurait éperdu et à peu près annihilé....