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Je suis partout, 2 mai 1941

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Je suis partout
2 mai 1941


Extrait du journal

M oni; une fois, l'Europe a fumé d’événements; le Destin a parlé d’une voix tonnante. Comme dans tous les moments ou le monde se renouvelle, chaque fait, chargé «te réalité, s'est de plus revêtu d’un sens svinbolique : tout ce «pu s’est produit «lans ces derniers jours, sous un soleil d'Apoca lypse, résumé, concentre, éclaire, révélé tout ce qni se cachait depuis longtemps, sous les apparences des jours ordinaires. I.a politique anglaise avait toujours de de se servir des nations «le l’Europe selon son propre intérêt et contrairement au leur; sa dernière ressource a etc de précipiter immédiatement dans l’abîme deux malheureux peuples, pour essayer elle-même de n'y pas tomber. L’action impérieuse des Etats-Unis sur ia Yougoslavie hésitante a étonné beau coup de gens, mais elle n'a fait que rendre patente l'influence que la maçonnerie anglo-saxonne exerçait constamment sur les affaires du vieux monde. Ainsi tout un système de domination s’avoue au moment ou il va craquer, et se laisse voir quand il va se rompre. L’éloquence dcmocratiquc-libvrale se déchire en découvrant Je s coffres-forts qu’elle avait pour fonction de recouvrir. Les trompettes du Destin sonnent la fin de l’Empire anglais, les continents et les mers jettent leurs vieux masques pour montrer n,n jeune visage. Est-il possible d’igre assez petit pour ne pas sentir ces choses immensA ? ■ ■ Pour beaucoup de nos compatriotes, cependant, reconnaître et accepter i’vvidencc ne va pas de soi. Car rien d’extérieur ne s'impose a nous sans une disposition favorable «le notre bon sens. Les catastrophes n’instruieent pas les gens parce qu’elles les assomment, et voir trenle-siv chandelles n’est pus la meil leure façon d’être éclairé. Même ce qui crcve les yeux n’entre pas naturellement dans les têtes : même une réalité formidable n'est reçue par nous avec profit «pie si nous pouvons l'accueillir selon l’honnêteté de nos tendances et ia justesse de nos idées générales. Or, beaucoup de Français, pour comprendre ce qui arrive aujourd’hui, devraient changer d'abord l'idée qu'ils se faisaient du monde d'hier, dette représentation, abstraite et verbale, n’était nourrie de rien de réel, car la France, par tous scs genres d’activité, ne débordait plus dans le monde : c’était lui qui entrait en elle pour la dominer, au lieu qu’elle entrât en lu.i pour le connaître. I.a grande industrie était bien plus occupée a se faire des domaines protégés qu'a conquérir des marchés nouveaux. Les politiciens étaient ennuyés qu'il y eût un monde, car ce drame extérieur les gênait dans le tranquille exercice de leur industrie, qui était l’exploitation de la France. Les intellectuels bien vus du régime, alors même qu’ils se transportaient dans d’autres pays, n’y faisaient que «les voyages jiour ainsi dire artificiels, préparés, réglés, limites d’avance, de telle sorte qu’ils n'eussent point à rencontrer rien d’imprévu, et ainsi les pon deurs de conférences, comme ils portaient à l’étranger une idée convenue de ia France, rapportaient en France une idée convenue de l’étranger. Dans cet ensemble de conditions, les rapports avec l'Allemagne, plus importants pour nous que tous les autres, puisqu'ils devaient déterminer le- sens de notre action, étaient les plus empêchés, et c’était déjà se faire mal voir que d’aller en Alle magne. tl ne fallait pas que les Français et les Allemands se connussent, parce que la connaissance aurait pu supprimer l'hostilité. Ainsi, tandis que les forces du dehors agissaient chez nous et dans nos a fia ires, notre esprit ne se figurait en rien ce monde où se préparait notre sort. Les Français étaient d’autant plus captifs des idées fausses qu'on leur avait impo sées qu'ils les prenaient pour «tes vérités évidentes. Us liaient convaincus, et beaucoup en sont encore là. qu’il n'y avait y» a s autre chose à penser, sur toute l'évolution de notre politique étrangère, que ce qu’on leur a fait accroire; toute la malice de ceux qui les ont conduits à la guerre a été de les persuader qu’elle était •fatale; c'est grâce à cette fiction qu’on a rejeté toutes les occasions de l'évi ter. Combien de Français connaissent les carrefours ou, da'us ces dernières années, la E'rance aurait pu prendre d’autres voies ? Combien savent dans quelles conditions de violence et de frau«f«' furent fabriqués, après l'autre guerre, les traités qui fixèrent l’organisation de l'Europe orientale ? Combien savent au juste quand, comment et par qui échoua le projet «le limiter les armements ? C'est parce qu’ils sont toujours imbus des faussetés qui régnaient hier qu’ils ont peine à comprendre la réalité d’aujourd’hui : s’ils en ont une vue si étroite et si ineomyilete, c’est qu'ils ne l’aperçoivent qu’au bout du long tunnel d’erreurs où ils sont encore. (Lire la suite en sixième page.)...

À propos

Anticommuniste, profasciste, antisémite et positivement favorable à Hitler, Je suis partout est le journal d’extrême-droite le plus violent jamais publié en France. Si violent que son directeur Arthème Fayard, fondateur des éditions Fayard, décide dès mai 1936 de cesser sa parution. À sa mort en novembre 1936, le journal est toutefois relancé par son fils et Pierre Gaxotte, futur membre de l’Académie Française.

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