Extrait du journal
PROPRIETE ET SPOLIATION. I (Tûisième article.) Les services s'échangent contre des services. Je suis obligé de me faire violence pour résister à la tentation de montrer ce qu'il y a de simplicité, de vérité et de fécondité dans cet axiome. Que deviennent devant lui toutes ces subtilités : Valeur d'usage et valeur d échange. produits matériels et produits immatériels. classes produc tives et classes improductives ? Industriels, avocats, médecins, fonction naires , banquiers, négocia ns, marins, militaires, artistes, ouvriers . tous tant que nous sommes, à l'exception des hommes de rapine, nous rendons et recevons des services. Or, ces services réciproques étant seuls commensurables entre eux, c'est en eux seuls que réside la valeur , et non dans la matière gratuite et dans tes agens naturels gratuits qu'ils mettent en œuvre. Qu'on ne dise donc point, comme c’est aujourd'hui la mode, que le négo ciant est un intermédiaire parasite. Prend-il ou ne prend-il pas une peine? Nous épargne-t-il ou non du travail ? Itend-il ou non des services ? S'il rend des services, il crée de la valeur aussi bien que le fabricant. Comme le fabricant, pour faire tourner ses mille broches, s’empare , par la machine à vapeur, du poids de l atmospliére et de l'expansibilité des gaz, de même le négociant, pour exécuter ses transports, se sert de la direction des vents et de la fluidité de l'ean. Mais ni l'un ni l'autre ne nous font payer ces forces naturelles, car plus ils en sont secondés , plus ils sont forcés de baisser leurs prix. Elles restent donc ce que Dieu a voulu qu'elles fussent, un don gratuit. sous la condition du travail, pour l'humanité toute entière. En esl-il autrement en agriculture ? C'est ce que j’ai à examiner. Supposons une île immense habitée par quelques sauvages. L’un d'entre eux conçoit la pensée de se livrer a la culture. 11 s’y prépare de longue main, car il sait que l'entreprise absorbera bien des journées de travail avant de donner la moindre récompense. Il accumule des provisions , il fabrique de grossiers inslrumeus. Enfin le voilà prêt ; il clôt et défriche un lopin de terre. Ici deux questions : * Ce sauvage blesse-t-il les Droits de la communauté? Blesse-t-il ses intérêts? Puisqu’il y a cent mille fols plus de terres que la communauté n’en pour rait cultiver, il ne blesse pas plus ses droits que je ne blesse ceux de mes compatriotes quand je puise dans la Seine un verre d'eau pour boire, on dans l'atmosphère un pied cube d'air pour respirer. Il ne blesse p»s davantage ses intérêts. Bien au contraire: ne chassant plus ou chassant moins. ses compagnons ont proportionnellement plus d’espace ; en outre, s’il produit plus de subsistances qu’il n'en peut consommer, 11 lui reste un excédant à échanger. Dans cet échange, exerce-t-il la moindre oppression sur ses semblables ? Non, puisque ceux-ci sont libres d'accepter ou de refuser. Se fait-il payer le concours de la terre, du soleil et de la pluie? Non, puisque chacun peut recourir , comme lui, à ces a gens de production. Veut-il vendre son lopin de terre, que pourra-t-il obtenir? l’équivalent de son travail, et voilà tout. S’il disait : Donnez-moi d'abord autant de votre temps que j’en ai consacré à l’opération, et ensuite une autre portion de votre temps pour la valeur de la terre brute; on lui répondrait: Il y a de la terre brute à côté de la vôtre, je ne puis que vous restituer votre temps, puisqu'avec un temps égal, rien ne m'empêche de me placer dans une condi tion semblable à la votre. C'est justement la réponse que nous ferions au por teur d'eau qui noqs demanderait deux sous pour la valeur de son service et deux pour la valeur de l’eau ; par où l’on voit que la terre et l’eau ont beau coup d'utilité , et que ni l’un ni l’autre n’ont de valeur. Que si notre sauvage voulait affermer son champ, il ne trouverait jamais que la rémunération de son travail sous une autre forme. Des prétentions exagérées rencontrant toujours cette inexorable réponse : « Il y a des terres dans l'ile, » réponse plus décisive que celffc du meunier de Sans-Souci ; « Il y a des juges à Berlin (I). » (1.) Nous avons entendu naguère nier la légitimité du fermage. Sans aller ju.-que-là, beaucoup de personnes ont de la peine à comprendre la pérennité du loyer des capitaux. Comment, disent-elles , un capital une fois formé peut-il donner un revenu étemel? Voici, par un exemple, cette légitimité et cette pérennité expliquées. J'ai cent sacs de bié, je pourrais m'en servir pour vivre pendant que je me livre à un travail utile. Au lieu ue cela, je les prête pour un an. Que me doit l'emprunteur? la restitution intégrale de mes cent sacs de blé. Ne me doit-il que cela? En ce cas, j’aurais rendu un service sans en recevoir. lime doit donc , outre la simple restitution démon prêt, un service , une rémuné ration qui sera déterminée par les lois de l’offre et de la demande : c’est l'in térêt. On voit qu'au bout de l’an , j’ai encore cent sacs de blé à prêter , et ainsi de suite pendant l’éternité. L'intérêt est une petite portion du travail...
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Fondé en 1819, Le Journal de la ville de Saint Quentin publie les annonces judiciaires de son département sans le concours du gouvernement. L’initiative porte ses fruits puisque la publication du journal demeure assurée jusqu’en 1914.
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