Extrait du journal

Saint-Quentin, 27 octobre. Si nous en croyons les journaux anti ministériels et cette fois, il faut le dire, l'événement semble leur donner raison, ce n’est pas seulement au ministère Rou vier mis trois fois en minorité pour son début de session, que la journée du 23 a été néfaste : « Les boules noires ont ricoché jusqu'au Président de la Républi que », nous dit-on. Il convient de noter ce souci que sem ble avoir depuis quelque temps une no table fraction de la presse républicaine de mettre toujours en cause, à tort ou à rai son, le Président de la République, sans faire attention que ses attaques ricochent sur cette République elle-même dont on détruit ainsi l’unique et bien pauvre oasis de confiance et d’estime. Aujourd’hui les attaques,pour être ma ladroites, ne sont pas sans fondement, car le député qui a fait si mauvaise figure sur la sellette, à Paris dans la journée, et le soir à Tours, est depuis trop longtemps couvert par l’indulgence de son beaupère. Nous ne voulons pas nous porter garants de la parfaite impartialité des six chefs d’accusation portés par MM. Laurent du Paris et Roche de Y Intransigeant con tre M. Wilson devant les assises électora les de Tours ; mais il est de notoriété publique que depuis longtemps pour la satisfaction de ses petits intérêts le gendre joue de son beau-père — lequel laisse faire un peu trop bénévolement — avec un sans-gêne qui frise le cynisme. Ce ne sont pas seulement les journaux intransigeants — dont, nous le répétons, l’impartialité est sujette à caution, et chez lesquels cette pudeur inaccoutumée pour rait bien avoir sa source dans le souci de « l’ôte-toi de là que je m’y mette », plu tôt que dans celui de la moralité républi caine— qui s’élèvent contre un népotisme mercantile infiniment trop prolongé ; c’est l’opinion publique toute entière ; et, les Petite France exceptées, nous ne trouvons pas un organe qui ose se faire l’avocat du député de Tours. Les plus indulgents se bornent à essayer de séparer la cause du beau-père de celle du gendre. La séance du 23 a fourni une indéniable preuve de cette quasi-unanimité de répro bation, et M. Rouvier, qui, peut-être, a ses raisons pour n’être point personnelle ment trop chatouilleux en matières mer cantiles, a été ministériellement bien ma ladroit en essayant de se mettre en travers du courant général d’opinion. Sa distinction des pouvoirs juridique et législatif aurait sa valeur s’il s’agissait de simples particuliers. Mais ni M. d’Andlau, ni M. Wilson ne sont de simples particu liers. Celui-là est sénateur ; celui-ci est député,et député d’autant piusen vue qu’il est le gendre du premier magistrat de la République. Sénat et Chambre ont donc absolument le droit de vouloir s’éclairer sur les accusations portées contre leurs membres. Oh ! nous ne prétendons pas qu’ils le voudront jusqu’au bout et que l’enquête ne paraîtra pas dangereuse pour eux-mêmes à plusieurs des 363 députés qui ont réclamé l’urgence de cette enquête....