Extrait du journal

— La douleur ma fille. — Une de ces décep lions terribles, capables de dévaster une vie d’homme Oui, la douleur, répéta Marianne avec une émotion singulière; mais vous êtes trop heureuse, trop jeune, vous, pour comprendre de tels désespoirs. Madame d’Asmond l’interrompit presque avec violence : — Tu te trompes, Marianne ! Si tu pouvais me voir, peut-être ne me reconnaîtrais-tu pis, tant j’ai pleuré, souffert... J’ai vingt-deux ans, et mon existence est close, je suis veuve... La sereine figure de l’aveugle se transfigura. — Veuve ! vxclama-t-elle avec une joie m il dissimulé». — Pas absolument, reprit Marguerite d’un ton sourd. Je suis abandonnée.., femme -sans mari, veuve sans liberté... Marianne chancela comme si elle eût reçu un coup violent, et attirant M irguerite, elles sanglo tèrent une minute sans pouvoir s’arracher des bras l’une de l’autre. — Je n’avais pas entendu conter cette triste histoire, disait la vieille gouvernante de Roger en s’essuyant les yeux : les bruits de Collioure montent si rarement ici ! Eh quoi ! cet homme a brisé ainsi votre avenir ? Vous si charmante, si bien faite pour le bonheur ! Ah ! si mon cher maître l’apprenait ! — Il ne s'en soucierait guère, murmura Mar guerite. Une plainte d’enfant rappela h mère à ses devoirs. — Quel dommage ! Tu ne peux a tinirer mes chérubins, fit-elle avec un sourire. Viens, je vais te présenter m >n fils, M. Jacques d Asinond, et sa sœur, mademoiselle Odette. Mari inné se pencha vers la voiture, embrassa les bébés, et, de ses doi-ts tremblants, effleura leurs visages. — Ils sont beaux, affirma-t-elle. Ils seront bons comme vous, et vivre pour eux, c’est encore une * Marianne n’était nullement une nature inculte ni commune. Fille de fermiers, intelligente, fort...