Extrait du journal
A l’aube, Madeleine n’éprouva pas le bien-être qu’on espérait du repos de la nuit. Une torpeur pesante l’accablait; son front était martelé, et chaque coup de ce marteau imaginaire lui causait une intolérable souffrance. Le médecin revint et reconnut tous les symptômes d’une fièvre céré brale. Durant six semaines, elle fut entre la vie et la mort. Son fils ne la quittait guère. Il la regardait souffrir, sombre, obstinée. Son visage était mé connaissable, tant il était amaigri; et, dans cette figure blanche comme une cire, se montraient ses grands yeux noirs, tristes et f irouches, au fond desquels on devinait une nuit d’agonie et de remords. Jamais une parole : rien que ces grands yeux démesurément ouverts. Même dans le délire de la fièvre, elle ne trahissait pas son secret; sa volonté persistait. Elle avait comme l’intuition que son fils était à son chevet. Parfois, elle l’ap pelait d’une voix faible, et murmurait des paroles de tendresse : — Mon Henri, mon bien-aimé. Vite, il s’approchait, se penchait sur elle. De ses yeux largement ouverts elle le regardait... et ne le reconnaissait pas. A certaines heures, Henri confiait sa mère à la garde attentive de Marie-Joseph '. Alors, il s’en fermait dans sa chambrette; car il devait, par son travail, suffire aux dépenses. Comme autrefois, la lampe brillait tard dans la nuit et se rallumait avant les premières lueurs du jour; mais les rôles étai nt intervertis : le fils travaillait pour la mère. Il veillait avec courage durant les nuits si longues de l’hiver, et mettait en ordre les livres de comptes d’une importante maison de commerce. Parfois, il était bien las, ses paupières étaient brûlées de sommeil; néanmoins, il était satisfait. Enfant, il avait connu le bonheur des faibles : la protection, les baisers de sa mère; maintenant, il connaissait le bonheur des forts : protéger lui -même; et, vail lamment, il acceptait les âpres joirs de la fatigue, le saint orgueil de la lutte, de la responsabilité, du sacrifice....
À propos
Fondé en 1861 à Roanne sous le nom de Nouvel Écho de la Loire, l'hebdomadaire devient en 1864 le Journal de Roanne et revendique une ligne éditoriale « régional et patriote ». Toutefois, le journal collabore avec les Allemands sous l’Occupation et est en conséquence supprimé en 1944.
En savoir plus Données de classification - bouvier
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