Extrait du journal

MEAUX. AUDIENCE DE POLICE CORRECTIONNELLE, Du 10 décembre i83j. — P résidence de M. Viellot. — Michel Bottier est un journalier de la commune de Villevaudé qui passe la moitié de sa rie à la manière du franc taupin : après avoir travaillé six jours durant, il trouve tout commode de se reposer le septième en buvant une bouteille avec un de ses amis. Or: un soir qu’il rentrait d'un pas aviné, dûment escorté par une douzaine de moutards, sa femme courut au devant de lui pour lui faire des remontrances en manière d’injures, et lui reprocher son inconduite. Qui aime bien châtie bien , dit le proverbe , et comme Bottier sait cela et qu’il n’aime pas à être moréginé par sa charmante moitié, il prît la liberté grande de lui administrer une correction mari tale à la mode de son pays; mais comme sa méthode n’a pas encore passé par la rue Tarane et qu’elle semble un peu trop abstraite, il s’est vu traduit pour ces faits devant le tribunal de police correctionnelle. Aujourd'hui il paraît encore échauffé par le vin, et ses jam bes fléchissent de tems en tems sous le poids de son individu : sa défense excite au plus haut point l’hilarité du tribunal, et tout en prétendant qu’il n’a jamais battu sa femme, il convient lui avoir donné des coups de casquette. Bendant le délibéré , Bottier se voyant dégagé de la sévérité du magistrat, racontait ses peines aux personnes placées der rière le banc des avocats : t ah la malheureuse ! disait-il, c’est elle qui est adultère qu’on me pende plutôt, s’il y a une potence » Et plus tard, en entendant sa condamnation eu dix jours de prison et au dépens, Bottier s’écriait encore au Tribunal : « condamnez-moi plutôt en dix ans, messieurs ; mais moi je ne demande que de l’ouvrage. »...