Extrait du journal

maudite, l’attachait au rivage : une inspection, des revues, son général, l’empereur... que sais-je ! Cette partie fut le vrai début du voyage. Elle nous ouvrit tout d’un coup les magiques horizons et les sereines joies de la vie nomade. Dijon, Mâcon, Lyon, ne sont que des fau bourgs de Paris. Même végétation, même ciel, mêmes blouses, même aspect. L’Italie com mence à Tain. C’est là que, guidés par des notes crayonnées l’avant-veille sur un coin de la table, du dîner d’adieu, nous avons quitté le vagon du che min de fer pour escalader l’impériale d’une vieille diligence convertie en omnibus. Aprèé trois quarts d’heure environ de par cours à travers un pays pittoresque et ver doyant que dominent de tous côtés les som mets bleuâtres des Alpes, le conducteur nous a déposés devant une petite porte de jardin. — Il faudra cogner fort, dit-il, on est dedans, vu la chaleur. Nous frappions depuis cinq minutes sans résultat, d’abord discrètement avec le doigt, ensuite plus fort avec le pied, enfin violemment avec des pierres, et l’inquiétude commençait à nous gagner, quand une calèche, arrivant au grand trot, s’est arrêtée soudain près de nous. C’était la famille entière, mère, frère, cousins, cousines, appelée tout exprès des environs pour fêter notre passage. Moments délicieux. On se reconnaît, on s’accueille, on s’embrasse. La porte Ouverte, nous franchissons un pont rustique, des bosquets de lilas jaunis par le sirocco, et nous entrons dans un frais salon...