Extrait du journal

Singulière fierté. Les obsèques de M. Jules Caumeau, conseiller municipal de Paris, viennent d'avoir lieu à Cosne, dans le département de la Niè vre, où il est décédé. Plusieurs discours ont été prononcés. Ils nous ont appris que M. Caumeau avait accompli de son vivant, sans que personne s'en doutât, une œuvre considérable, ce qui est tant mieux pour sa mémoire. Mais parmi ces discours dont la banalité le dispute à la solennité, un trait mérite d'être relevé comme représentant la plus étrange et la plus immorale des confusions-d'idées et de sentiments qu'on ait jamais faite. C'est à M. Lu cipia, président actuel du Conseil municipal et an cien membre dé la Commune, que nous devons sur M. Caumeau le renseignement qui suit : « Il avait deux grandes fiertés dont il s'enorgueillissait volon tiers : avoir défendu la Commune et être officier de l'armée française. » Cela prouve que M. Caumeau avait plus de fierté que de logique, et qu'il poussait l'éclectisme jusqu'à l'absurde. Qu'aurait-il fait en 1871, s'il avait déjà été officier? Serait-il passé àla Commune pour tirer sur ses frères d'armes de la veille? Serait-il resté dans l'armée pour faire son devoir de soldat? Cruelle énigme que nous ne nous chargeons pas de résoudre. Le brigand devenu gendarme peut avoir la fierté de ses deux métiers successifs ; mais on a toujours lieu dé craindre qu'il ne garde quelque chose du premier. M. Lucipia nous assure que M. Caumeau a eu également l'amour de la liberté et l'amour de la patrie ; il a fait preuve de ce dernieren profitant de la présence des Prussiens au tour de Paris pour prendre part à la plus criminelle des révoltes et pour accueillir à coups de fusil nus pauvres soldats à leur retour de l'exil. Nous vivons dans un temps où le sens des mots subit les plus étonnantes déviations. A quel trouble d'esprit ne faut-il pas être arrivé pour s'enorgueillir à la fois d'avoir été insurgé et d'être officier ? Le malheur est que le cas de M- Caumeau n'est pas unique. Le Bulletin municipal, dans son récit des funérailles, fait mention d'un discours prononcé par un lieute-...