Extrait du journal

Les jeux de la guerrç Il faut s'accommoder aux circonstances ; on tire de la guerre le parti qu'on peut. Un fabricant ingénieux a accommodé aux temps présents le paisible .jeu de l'oie. Il l'a appelé le Jusqu'au bout. C'çst une preuve naïve de la popularité du général Galliéni. Dans des jours difficiles, il avait annoncé la résolution de défendre Paris jusqu'au bout. Le mot est resté dans l'imagination populaire. Il reparaît dans un jeu que les collectionneurs se disputeront dès qu'il aura cessé d'amuser les enfants. Ainsi la petite histoire éclaire la grande. Il y a dans ce jeu de funestes numéros. , Tel est le numéro 6. On y voit un petit jeune homme en jaquette verte, qui lève les deux bras avec un mépris exalté, tandis qu'un autre qui a une redingote bleu per venche lui montre un parchemin roulé. C'est M. de Bethmann-Holhveg comparant les traités à des chiffons de papier. Celui qui l'amène paye l'amende et va se faire passer par un pontde bateaux. Le numéro 3e représente deux fantassins allemands menés par deux dragons fran çais; le joueur infortuné reste prisonnier en leur compagnie. Au 56, autre disgrâce. Sur un ciel rouge et jaune, une femme échevelée, qui tient un petit couteau, vole avec raideur. Les deux empereurs fuient devant son visage terrible. C'est le châti ment ;, il faut payer double amende et re commencer tout le jeu. Mais au 63, une li gure plus radieuse annonce la lin de la par tie. Elle a des ailes jaunes, un corselet bleu, une jupe rose qui laisse une cuisse nue. Elle est coiffée d'un bonnet phrygien, sur lequel perche un coq. Cette coiffure, d'un équilibre si difficile, ne l'empêche pas de tendre un bras armé et de crier à pleine voix. C'est la Victoire....