PRÉCÉDENT

Journal des débats politiques et littéraires, 4 août 1871

SUIVANT

URL invalide

Journal des débats politiques et littéraires
4 août 1871


Extrait du journal

aussi peu conformes l'un que l'autre à la justice et à l'intérêt public. Entre les chefs et les soldats d'une insurrection pari sienne, il n'y a point la différence que supposait le Times clans la correspondance dont nous avons reproduit hier un extrait, car ce monde-là est un monde à rebours. De même qu'il écrit sur tous les xnonu mens, les prisons et les casernes compri ses, sa fameuse devise : Liberté, Egalité, Fraternité, il n'admet pas que les chefs commandent et que les soldats obéissent, pas plus qu'il ne trouve bon que les patrons ordonnent et que les ouvriers exécutent. Chez lui, la hiérarchie est retournée, la pyramide sociale ne repose plus sur sa basé, mais sur sa pointe, les ouvriers sont les maîtres à l'atelier, les soldats dirigent les généraux et le « peuple » gouverne le gouvernement. Serait-il donc équitable de s'en prendre exclusivement à ces prétendus « chefs », et d'amnistier en masse leur ar mée, comme le conseille le Times? C'est l'armée qui est redoutable, il ne faut pas s'y tromper; cela est si vrai, qu'en juin 1848, cette armée de la République démo cratique et sociale ne s'était même pas donné la peine de se choisir des chefs. Elle en avait cette fois-ci, mais, vrai ment, elle leur obéissait si peu qu'elle aurait pu certainement se dispenser d'en avoir. Nous ne croyons donc pas qu'il soit juste et encofe moins qu'il soit prudent de concentrer sur quelques têtes toutes les sévérités de la loi et de gracier toutes les autres, et voilà pourquoi nous ne pouvons nous ranger à l'opinion du Times. Que 1 on se hâte d'abréger les souffrances des pré venus, que l'on augmente le nombre des juges d'instruction, que l'on mette sans tarder davantage les innocens en liberté, qu'on montre de l'indulgence pour ceux qui ont été contraints ou entraînés, que l'on punisse les misérables dénonciateurs qui ont profité de ces cruelles circonstances pour assouvir des haines ou des cupidités particulières, nous ne demandons pas mieux, et nous sommes parfaitement d ac cord sur ces différens points avec le Temps et le Siècle. Mais rien de plus ! La situation n'est pas encore assez rassise, et la sécurité dont nous jouissons assez consolidée pour qu'on puisse sans danger laisser rentrer dans Paris l'armée de l'insurrection. • Le-système de la transportation en masse dans une colonie lointaine on a désigné la Nouvelle-Calédonie nous a paru sou lever aussi des objections sérieuses. C est trop souvent une peine qui équivaut à la mort, et c'est aussi une peine des plus coûteuses, chose à considérer dans 1 état actuel de nos finances. C'est pourquoi nous avons exprimé le regret que l'on ait effacé du Code la peine du bannissement, qui est pourtant, à la bien examiner, la mieux appropriée aux faits politiques. On peut discuter, en effet, sur le degré de crimina lité des fauteurs ou des acteurs d'une in surrection ; on peut se demander, par exemple, s'il y avait entre les révolution naires de février 1848 et les insurgés de •juin, ou bien même entre les auteurs du 4 septembre et ceux du 18 mars une diffé rence tout à fait radicale ; mais tout le monde est d'accord, en ce moment du moins, pour considérer les réformateurs à main armée comme des gens dangereux et pour accor der à la société le droit de les exclure de son sein. Eh bien! c'est ce droit que nous voudrions voir inscrire de nouveau dans le Code, et franchement nous ne nous at tendions pas à ce que les philanthropes du Temps et du Siècle y trouvassent à redire. Serait-ce donc parce que le bannissement sent son ancien régime, tandis que la dé portation et la mort, sont plus conformes à la tradition révolutionnaire? Mais on ban nissait aussi dans les anciennes républi ques, on bannissait même beaucoup , et c'est dans une république qu'on a inventé l'ostracisme. On pourrait soutenir même que le bannissement, est une peine encore plus républicaine que monarchique. Cette dernière considération ne devrait-elle pas suffire pour lui rallier les suffrages du \ Temps et du Siècle? G. DE MOLINARI....

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

En savoir plus
Données de classification
  • thiers
  • de rémusat
  • lenoël
  • léon de maie
  • ricard
  • de ravinel
  • finch
  • laffite
  • davies
  • a. macmce
  • paris
  • versailles
  • france
  • berlin
  • chambre
  • cham
  • strasbourg
  • tavistock
  • autriche
  • russie
  • l'assemblée
  • la république
  • assemblée nationale
  • journal officiel
  • une république
  • g. p.
  • conseil de guerre
  • cologne
  • république française