Extrait du journal

Nous avons reproduit le jugement du tribunal correctionnel d'Annecy qui ra contait l'histoire d'un nouveau miracle raté et d'une nouvelle bergère dont les extases avaient été couronnées, par cinq ans de clôture, non pas dans un couvent, mais dans une maison de correction. Nous ne nous serions pas occupés d'une pa reille farce, "tant nous sommes écœurés et dégoûtés de toute cette pharmacie ihaumaturgique, si les journaux pieux n'avaient, avec-leur aplomb habituel, pris les devans de la publicité et essayé de faire tourner au profit des miracles an ciens la condamnation du nouveau. Ce" jugement,, disent-ils, vient à l'appui des vrais miracles, et l'exception confirme la règle. La police correctionnelle a con-~ damné le miracle de Savoie ; donc les miracles de la Salette et de Lourdes , qui ne sont pas poursuivis , sont authen tiques. Nous serions portés à croire que si les fabricateurs et brocanteurs de miracles n'ont pas voulu reconnaître celui-là, c'est qu'ils l'ont trouvé inopportun ; il tombait dans un mauvais moment. Les gendarmes set les tribunaux correctionnels sont mal disposés ; et le public, même dévot, est un peu saturé de toutes ces eaux qu'on lui fait avaler. D'ailleurs, Lourdes et la Salette sont protectionnistes ; le libre échange et la libre concurrence des mi racles minéraux feraient tort à leur in dustrie. On finirait par ne plus trouver assez de boiteux, assez de paralytiques, assez de phtisiques pour suffire à tous ces pèlerinages ; il faudrait refaire la Cour des Miracles d'autrefois, ou bien, sans aller si loin, recruter tous les anciens fonctionnaires de l'Empire qui se font al louer des pensions pour infirmités. On n'a donc donné aucun encourage ment à ce pauvre miracle savoyard, en quoi nous trouvons qu'on a été injuste, car enfin il réunissait toutes les condi tions voulues. La recette est bleu simple. Ou prend une bergère; toujours une ber gère, c'est indispensable. Puis on prend...