Extrait du journal

dans la poche d'étoffe qui pénd au dessous du brancard, frôlée par la roue. Les chemins sont indéfinis et déserts. L'ombre confond tous les signes aux quels le voyageur de jour demande un renseignement. Mais l'homme ne s'in quiète pas. Sa bête évite d'elle-même les voitures ou les pierres en tas. Elle s'ar rête devant les auberges closes et noires, et elle se secoue. Le messager s'éveille. Une lumière s'allume; une servante pousse le contrevent, et tend au dehors la chandelle que le vent fait couler : « C'est vous, Loiseau ? Oui. Le vin chaud est prêt. Toujours dans le môme coin. Vous savez où est la clef? —Oui.— Je ne descends pas. Bonsoir. » Il ouvre, il se sert lui-même, et il repart, au petit pas, accompagnant son cheval, dans le cercle étroit de sa lanterne. Toute la nuit se passe de la sorte, et, le lendemain, le paysan, qui a dormi ses huit heures, se sent aristocrate, en face dii voiturier qui rentre au village, alourdi par une longue marche. Il se rend va guement compte qu'il y a une distance entre demander son pain à des clients de hasard, disséminés, dont on dépend plus ou moins, et l'attendre de la terre, do son champ immobile et soumis. Il viendra prendre livraison do la lame do faux qu'il avait donné commission d'a cheter, mais il causera peu avec cet am bulant, dont les relations sont trop nom breuses, dont la vie n'est pas, comme la sienne, exposée au contrôle de toutes les heures et do tous les regards. Pour le taupicr, c'est bien pis. Celui là n'a pas bon renom. Il habite à l'extré mité du bourg, souvent même une petite maison isolée, une closerio en bordure...