Extrait du journal

est un lieu littéraire, ■ comparable à ces palais allégoriques clans lesquels les pein tres groupent les personnages des scènes historiques qu'ils veulent nous montrer. Que beaucoup d'écrivains et même de nombreux lecteurs éprouvent de la lassi tude et même un peu d'ennui à suivre encore un personnage à Venise après l'abus qu'on a fait de ces promenades, cela est possible. Mais qui ne voit qu'avec ces éléments vénitiens M. flenri de Régnier ordonna chaque fois un tableau imaginé, une sorte de composition où la grâce mélancolique de Watteau se déploie dans la lumière de Claude Lorrain? Une sensibilité ex quise se joue à travers ces pages parmi des inventaires d'objets d'art qui ont le mérite d'être bien choisis. ' La fiction légère et comme effacée, la scénario pâle créé pour des ombres, le drame inconsistant et sans pathétique ne sont là qu'à titre de prétexte. C'est un itinéraire en pointillé qui guide à peine la fantaisie du poète et de l'artiste. Toul l'intérêt du livre, nous le trouverons dans la musique intérieure que provoque le frôlement de tant de choses délicales. Comme ces verreries qui se mettent à vibrer quand un instrument résonne dans la pièce où elles étaient auparavant muettes, notre âme s'associe aux évoca tions vénitiennes du poète, un élan nous emporte, le livre est oublié et nous voici en pleine songerie, écoutant nos voix intimes, qui nous murmurent des choses merveilleuses. Et c'est sans doute pour que nous l'oubliions mieux, pour que nous nous retrouvions mieux nous-mêmes que M, Henri de Régnier nous offre des thèmes si fragiles, si vite évanouis.Quelle charmanle modestie ! JEAN DE PIERUEFEU....