Extrait du journal

Un journal allemand écrivait, hier, que, sur l'univers chaque jour plus tourmenté et plus incertain, s'annonçait un véritable typhon. A ce mot, la pensée se reporte vers l'ouvrage de Conrad paru sous ce titre et où l'on voit un capitaine sauver son navire en dépit d'une tempête sans nom. Mais, parmi l'amoncellement des nouvelles de cette nuit traitant pour la plupart des événements qui, de Genève à l'Asie et de Berlin à Washington, traduisent la fièvre du monde il est un modeste télé gramme de trois lignes qui apporte sa note de rêve : « Le commandant Raynal, le héros du fort de Vaux, parlera demain, à Lille, au profit du monument qui va être érigé à Paris aux pigeons voyageurs, en souvenir des services rendus par ces oi seaux. » En notre pays, où ni l'alouette ni le coq n'ont cessé d'être des emblèmes, le pigeon a doublement droti de cité : par l'accent que son vol familier donne à nos cours de ferme et par les exploits dont ses ailes évoquent la mémoire sur l'horizon j des champs de bataille depuis 1870. Il y a quelques mois, au Conseil muni cipal (1), M. Florent Matter demandait à ses collègues d'accorder un emplacemënt à la Fédération nationale des sociétés co lombophiles de France, pour y ériger un monument « à la gloire du pigeon voya geur et en l'honneur des colombophiles morts pendant la guerre ». La proposition fut renvoyée aux troisième et quatrième commissions et, au nom de cette dernière, peu de jours après, elle était adoptée. Rien n'est plus émouvant que le rapport officiel établi, le 13 août 1916, par l'armée de Verdun. Quel ordre du jour ! Après avoir montré que, malgré toutes les pré cautions, « en raison de l'activité formi dable de l'artillerie ennemie ou de la mau vaise visibilité, la plupart des moyens em ployés pour conserver la liaison étroite avec les unités combattantes sont insuffi sants et font souvent défaut au moment dans la zone des attaques, le retard des renseignements transmis par coureurs dans les terrains bouleversés et sous la violence des barrages, l'obscurcissement des signaux optiques par la fumée et la poussière, l'insuffisance des observations...