Extrait du journal

tiels en amènerait d'autres. Ne demande t-on pas déjà la dissolution de la Chambre, et des élections nouvelles au plus fort d'une anarchie morale presque sans précé dents? Si lé pays sait reconnaître les siens, il sera bien habile, car, dans la mêlée où nous sommes, amis et ennemis, tout est confondu et méconnaissable. On n'entend même plus celui qui crie le plus fort, mais plutôt celui qui calomnie le plus bas. Comment sortir d'une situation qui ne saurait se prolonger sans amener les plus graves dangers? Le gouvernement a-til pour cela un plan de conduite? Lui seul peut en avoir ou s'en créer un, car lui seul tient entre ses mains les fils de l'intrigue qui reste encore si embrouillée aux'y eux du public. Les tient-il tous, nous l'ignorons, mais ne devrait-il pas en être ainsi d'après le temps écoulé à partir du jour où cette triste affaire a été soulevée ? Lorsqu'il a or donné les poursuites contre les administra teurs du Panama, le gouvernement n'était pas sans savoir, ou du moins sans pres sentir ce qu'il faisait et où il allait. Qu'il ait eu quelques surprises, soit ! Mais pourquoi en prolonger si long temps la pénible anxiété ? On comprend difficilement que l'instruction ouverte n'ait pas encore produit un résultat affirmatif ou négatif, tout au moins en ce qui concerne les cinq sénateurs et les cinq députés dont l'immunité parlementaire a été suspendue. Il est cruel pour eux de rester si longtemps sous le coup d'un soupçon peut être immé rité. Mais ce n'est pas le seul mal. A côté des douleurs personnelles, il y a l'inconvé nient politique et général. Le soupçon enfante le soupçon, et c'est ce premier ali ment donné en pâture aux imaginations populaires qui a permis depuis de leur en servir tant d'autres, voire même des plus grossiers. Il faut faire la lumière tout entière ; au point où nous en sommes, c'est le vœu général ; mais il faut la faire vite. Elle seule peut dissiper les brouillards où nous sommes. En attendant, ces brouil lards s'épaississent et leur atmosphère obscure favorise les plus mauvais coups. Nous en avons tous les jours une preuve nouvelle , dont la principale est dans les attaques dirigées avec une audace et une sûreté croissantes contre les Chambres, contre le Président, contre la République. Et dans cet assaut, plus per fide encore que furieux, tout le monde sait bien que s'il y a sérieusement quelque chose en péril, ce n'est pas l'honneur de M. Carnot....