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Journal des débats politiques et littéraires, 19 mai 1838

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Journal des débats politiques et littéraires
19 mai 1838


Extrait du journal

PARIS, 18 MAI. On assure que, sous très peu de jours, l'administration apportera à la Chambre des Députés des projets de loi tendant à concéder à des compagnies quelques-uns des, grands chemins de fer mentionnés dans le projet de loi du 15 février. Cette détermination n'a rien qui nous surprenne. La politique du gouvernement en matière de chemin de fer, c'est, selon les paroles prononcées à la tribune par M. le président du conseil, que le pays soit enfin doté de ces merveilleuses voies de communi cation. L'esprit de l'époque, c'est que l'on disserte un peu moins pour agir un peu plus. Ce dont le pays a soif, ce ne sont pas des stériles discussions à perte de vue, ce sont des actes décisifs ; c'est là ce qu'il attend du gouvernement et des Chambres, sur lesquelles s'appuie la royauté de Juillet. Dans cette pensée, le ministère proposait l'an dernier de confier aux compagnies l'exé cution des grands chemins de fer. Les délibérations de la Chambre des Députés ayant révélé que cette assemblée inclinait formellement vers l'exécution par l'Etat, le mi nistère, pour atteindre le but qu'il poursuivait, la mise en activité des chemins de fer, se rallia franchement à ce système. Averti par les derniers débats que la Chambre y refusait décidément son concours, malgré l'opinion unanimement exprimée il y a neuf mois par les orateurs les plus compétens, l'administration revient à l'idée de l'accomplissement par les compagnies. En cela, elle s'honore de rester fidèle au programme qu'elle a adopté à l'égard des chemins de fer. C'est, en effet, la seule voie qui puisse actuellement conduire à une conclusion positive ; et ce que l'administration tient par dessus tout à éviter, c'est, elle l'a Idéclaré, une conclu sion négative, un nouvel ajournement, un nouveau temps d'arrêt, tandis qu'autour de nous tous les peuples entrent dans la carrière et construisent des chemins de fer. Nous laissons à d'autres le soin de dire jusqu'à quel point l'Opposition s'est montrée animée du même zèle, et si elle peut se targuer d'avoir eu pour unique mobile, au sujet des grands chemins de fer, la ferme volonté de les voir entamer enfin. S'il fallait en croire les bruits que nous avons recueil lis, il serait question de saisir les Chambres de plusieurs projets pour chacune des grandes lignes. Il y aurait, par exemple, deux tracés de Paris à la Loire, l'un par Or léans, l'autre par Chartres et Tours. Il y en aurait deux de Paris à Rouen et à la mer, l'un par les plateaux , l'autre par la vallée de la Seine, et peut-être, qui sait, deux aussi de Paris à Bruxelles, l'un par Amiens, l'au tre par Saint-Quentin. Les Chambres, ajoute-t-on, de vraient être invitées à autoriser simultanément, s'il leur plaisait, les couples de Compagnies rivales. A l'appui de ces doubles chemins , on invoque le précédent des deux chemins de fer de Paris à Versailles , l'un par la rive droite, l'autre par la rive gauche de la Seine. L'exemple nous paraît très peu concluant. Pour un trajet aussi court que celui de Paris à Versailles, il convenait, il était indispensable que le chemin de fer eût une entrée dans chacune des deux moitiés de la capitale. Si le chemin de fer de Versailles n'eût abouti qu'à la rive droite , il eût été pour certains quartiers de la rive gauche comme s'il n'eût pas existé. Mais la continuité des deux che mins de fer jusqu'à Versailles est une faute. Une double entrée dans Versailles est absolument superflue. C'est une construction de luxe qui absorbe improductivement plusieurs millions et les enlève à d'autres entreprises plus fécondes. A partir de Châville les deux Compagnies eussent dû être astreintes, par la loi, à confondre leurs chemins jusqu'à Versailles, Que serait-ce donc, si cette erreur se répétait sur un développement non de quatre lieues, mais de trente et de cinquante? La quantité de capitaux effeclifs qui est disponible pour ces grands ouvrages est réellement limitée. La por tion du capital national que l'on peut, sans perturbation pour l'industrie française, consacrer à ces gigantesques ealreprises, doit à chaque instant être prise sur l'épar gne de l'année précédente. Or cette épargne est bornée, et mille usages divers, mille spéculations variées la réclament....

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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