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Journal des débats politiques et littéraires, 20 février 1896

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Journal des débats politiques et littéraires
20 février 1896


Extrait du journal

: L'Extrême Gauche s'est décidée à provoquer une grande manifestation populaire contre le Sénat. Il ne s'agit pas, d'ailleurs, de forcer les grilles du Luxembourg et d'arracher les Pères conscrits à leurs chaises cupules. L'indignation, même dans les milieux radicaux, ne se traduit plus par ces résolutions viriles, dont la « veu lerie » contemporaine ne saurait sans doute s'accommoder. Les temps héroïques sont passés et les « grands ancêtres » de la Convention ne trouveraient plus aujourd'hui à qui parler. Les protestataires actuels sont réduits, qui l'eût cru ! à. s'inspirer des traditions bourgeoises de l'opposition libérale à la fin de la monarchie de Juillet. Ils se contenteront d'exhaler leur amertume dans un « banquet réformiste », des tiné à célébrer l'anniversaire de la révolution du 24 février 1848. Cette date, plutôt négligée d'ordinaire) va prendre rang, cette année, dans le calendrier révolutionnaire. L'actualité amène parfois de ces surprises. Les éphémérides, Comme'les livres, ont leur destin. - Pour donner à ce banquet commémôratif et comminatoire une couleur locale appropriée aux souvenirs qu'il évoque, la présidence én sera décernée à M. Emmanuel Àrago, vété ran des luttes qui ont passionné la France; il y a un demi-siècle. Peut-être, en sa qua lité de . sénateur, cet honorable héritier d'un grand nom ne paraissait-il pas spéciale ment indiqué pour incarner contre le Sénat la « revendication, des droits du suffrage universel ». Il y a là une contradiction, au moins apparente, à laquelle la commission d'organisation n'a pas cru devoir s'arrêter. La présence d'un des doyens de l'Assemblée qu'il s'agit de flétrir, et qu'on taxe volontiers de sénilité, —ne manquera pas de relever le sel des épigrammes que les orateurs du Salon des familles se préparent à distiller. En entendant les brillantes variations qui seront exécutées sur le thème uniforme de la suppression du Sé nat, M. Emmanuel Arago pourra s'écrier, comme certain personnage de comédie : «On ne parle que de ma mort, là-dedans ! » Il eût été non moins intéressant de voirie Conseil des ministres participer à ces agapes révisionnistes. M. Doumer n'aurait certes pas été plus embarrassé de sa personne qu'au mi lieu de ses amis d'Auxerrc. Il a déjà l'oreille habituée au cri de guerre officiel : « A bas le Sénat ! » Faut-il croire que ses" collègues ont des scrupules • constitutionnels ' qu'il ignore ? M. Léon Bourgeois veut-il se montrer bon prince à l'égard du Sénat et lui pardonner d'a voir eu deux fois raison? Trouve-t-il qu'il est suffisant de ne pas reconnaître ses torts et qu'il serait excessif d'en tirer vanité? Ou bien, M. Ricard estimerait-il qu'une réserve de bon goût...

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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