Extrait du journal

On recommence à parler de crise ministé rielle. Les radicaux-socialistes échangent dans les couloirs des signes maçonniques. La Lan terne éprouve le besoin d'être fixée sur la po litique générale du Cabinet. Et on annonce, comme imminent, un grand débat sur cette pal pitante question. Cette Chambre est vraiment admirable. Son inconscience serait comique si l'intérêt du pays n'était en jeu. Comment! Nous voici à la fin de février, la discussion du budget n'est pas à moitié, et il a fallu plus de trois mois pour la mener jusque-là. Elle se poursuit avec une majestueuse lenteur qui ne permet même pas de prévoir à quelle époque invraisemblable elle pourra bien finir au Palais-Bourbon. Reste en suite le Sénat, qui ne peut s'en tirer à moins d'un mois, y compris le temps matériel d'impri meries rapports. Et nous n'avons plus que six ou sept semaines avant la date normale des va cances de Pâques. Mêlhe en siégeant jusqu'à la veille de Pâques,il devient impossible d'aboutir si les choses continuent de ce train et il est même douteux qu'on y parvienne en mettant les bou chées doubles. La Chambre, ou plutôt les bons radicaux qui la dirigent, ne paraît pas seule ment s'en douter. Elle continue à concevoir de vastes desseins. Elle prétend organiser les re traites ouvrières, réaliser l'abaissement des tarifs postaux, remanier la législation des bouilleurs de cru, régler la question des Syn dicats do fonctionnaires, sans compter toutes les fantaisies individuelles que la flagornerie électorale suggère aux députés chancelants. Et ce n'est pas assez. Il lui faut encore des explications sur le programme d'un ministère qui est aux affaires depuis plus d'un an, qui n'a plus d'ici les élections le temps de rien entre prendre, et dont la plus haute ambition ne sau rait être que de liquider au plus vite le budget, les quelques affaires urgentes et le problème marocain. On se demande véritablement quel peut être l'état mental de ces affolés qui s'agitent autour dé l'agonie de la Chambre, comme si leurs jours n'étaient pas étroitement comptés.Ce sont les mêmes, remarquez-le bien, qui réclamaient d'autre part que les élections générales eussent lieu en avril, alors qu'on aura toutes les peines du monde à pouvoir les faire en mai, à la der nière limite. Ils ne voient et ne comprennent rien de tout cela. Certes, si nous nous placions exclusivement au point de vue de l'opposition, nous ne pourrions que voir avec satisfaction la Chambre actuelle se fourvoyer dans une impasse. Le pays serait édifié sur les capacités gouvernementales des radicaux et des socia listes si la Chambre arrivait au bout de son mandat sans avoir même pu voter son qua trième budget. Ce serait une leçon de choses dont les électeurs pourraient faire leur profit. Mais ce désarroi causerait au régime parle-...