Extrait du journal

lera, qui fera marcher ces morts que l'histoire enterre sans épitaphe ?Le roman, c'est le roman qui fait ce miracle. Vous qui n'êtes ni rois, ni princes, ni ministres, voici des héros à votre taille. Vous que ne tourmente ni ia soif des grandeurs, ni celle de la gloire, voici des passions, des fai blesses communes à tous les hommes. Vous, que n'a jamais émus le récit des batailles perdues et des trônes renversés, venez gémir sur les inconstances, les trahisons, les catas trophes de l'amour. Vous, que l'histoire ennuie, prenez et lisez ; c'est le roman qui est votre histoire. Nous parlons du roman ordinaire : le roman historique fait mieux encore. Il marie la fiction à la réalité dans un seul et même tableau. 11 prête à la fiction le grave intérêt de l'histoire, et à l'histoire le charme irrésistible de la fiction. De ces héros qu'il crée à neuf, auxquels il donne un corps, une âme, un nom et une date, il fait un cortège à ces monarques, à ces princes, à ces héros dont le bronze de l'histoire a canonisé le nom et là gloire. Prolétaires de l'histoire , votre jour est venu ! Bourgeois, artisans , chevaliers sans nom, magiciens, mendians, gardeurs de pourceaux, aventuriers de toute sorte; et vous, tendres et célestes fleurs , Rébecca, Diana Vernon, Fe»élla, levez-vous et sortez de vos limbes. Que de constellations nouvelles à notre ciell que de satellites inconnus viennent se grouper auteur de ces royales pla nètes, Richard, Louis XI, Elisabeth, Marie Stuart I Voici le Paladin Richard qui revient de la Terre-Sainte avec le preux Ivanhoë. Voici le terrible châtelain de Plessis-les-Tours avec le brave et jovial Quentin. Voici le dernier des Stuarts avec le loyal Edouard Waverley. Comment rappeler tant de créations, médailles ineffaçables qui ont inauguré l'alliance de l'histoire et du roman ? J'aime et j'estime le roman historique : c'est déclarer mon goût pour celui de M. Eugène des Essars. Catherine de Les cun est un roman historique, bien que l'ouvrage, à vrai dire, tienne plus de l'histoire que dn roman, et du Mémoire encore plus que de l'histoire. La première pensée de 1 auteur a été de retracer un sujet historique, et il a choisi le cadre du roman pour donner plus de relief à son sujet. Il a visiblement sacrifié l'effet romanesque à l'effet historique. Est-ce un reproche que nous lui faisons ? Non ; mais nous voulons être compris en disant qua le romancier a été moins heureux que l'historien. L'auteur a réussi dans sa tâche principale, et le succès qu'il a cherché ne lui manquera pas. Il a fait une peinture, qui nous parait aussi curieuse que fidèle, d'une époque assez peu connue de notre histoire....