Extrait du journal
On nous dira : Que vous importe que les coreligionnaires de MM. Victor Hugo et Louis Blanc se soient attablés à SaintMandé ou à Marseille pour faire couler le Champagne en l'honneur de la république? Ces distractions sont en elles-mêmes très innocentes, et si la république n'en reçoit pas un grand bien, cela ne lui fait guère de mal. Oh ! à coup sûr, cela nous se rait fort égal, et ces messieurs seraient bien libres de fêter, si cela leur plaisait, tout le long de l'année la république; mais dans le choix de cet anniversaire, dans ce rapprochement entre 1792 et notre temps, il y a un principe inadmissible, car il est faux. Non, la république de 1876 n'est point la fille de la république de la Convention ; non, il n'est pas vrai que notre république procède de là. Ne re nouons pas, s'il vous plaît, jusqu'à ce point, la chaîne des temps, et distin guons ce qui diffère. En septembre 1792, la France traversait une crise lugubre : partout l'anarchie, la pénurie, la ter reur, la guerre aux frontières, les mas sacres au dedans ; c'était le règne des sec taires. La république surgissait, farouche étranglante. Est-ce là notre situation? Est-ce là notre république? Et pouvez vous comparer la France d'alors "et la France d'aujourd'hui? les tribuns de 1792 et noshommes d'Etat? Quelle ressemblance entre celte dictature populaire, la Conven tion, la Commune de Paris, le Comité de salut public, et notre gouvernement con- ; servateur, nos institutions parlementaires, notre politique de légalité, de liberté, de tolérance? Non, il n'y a entre ces deux régimes pas un rapport, pas un lien : il n'y a que la conformité du nom, et jamais même nom ne désigna des choses plus di verses. Est-ce que, s'il y avait entre la république actuelle et la première une ombre de parenté, le pays l'aurait prise? Vous ne sentez donc pas que ce qui a le plus compromis la cause de la ré publique, c'est précisément qu'on se rap pelait celle de 1792? Ce régime était né du désordre, donc il le ramènerait ; on ne sortait pas de là. Nous cependant, ses nouveaux amis, nous avons lutté contre ces préventions ; nous n'avons toujours cherché qu'une chose : faire prendre au sérieux par nos compatriotes et par nos voisins une république modérée. Nous croyons même y être parvenus....
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
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