Extrait du journal
tendent désormais nous gouverner. C'est un défaut sans doute et qui rend l'exercice du pouvoir infiniment diffi cile; mais ce défauta ses avantages. En face d'un peuple si naturellement défiant, qui ne se paie ni de promesses décevantes ni de paroles dorées, qui ne croit qu'aux faits accomplis et qui n'estime que les qualités solides, les gouvernemens sont contraints d'agir avec un sérieux souci de ses intérêts; les rois sont tenus de garder leurs sermens; et les princes, que la volonté nationale a placés sur les degrés d'un trône, comprennent qu'il leur faut racheter à force d'intelligence, de courage et de dévoue ment au pays, le privilège qui les destine éventuelle ment à l'honneur de le gouverner. Autrefois, quand la légitimité était l'unique droit d'un prince de sang royal, quand elle le transportait douce ment sur un trône aux acclamations de la noblesse ; quand la discrète obéissance du pays lui permettait de rester caché toute sa vie au fond d'un sanctuaire impénétrable à la foule, et d'où il ne sortait, aux jours des fêtes publi ques, qu'entouré du prestige éblouissant qui protégeait la royauté ; alors, il était commode d'être fils de Roi. Le privilège vous dispensait d'éducation. Presque tous nos Rois ont manqué d'études sérieuses. C'est en régnant qu'ils apprenaient à gouverner. Les hommes, même les •plus distingués, ne leur étaient connus, ne se communi quaient A eux que-sous le masque du courtisan. En Frarifce, aujourd'hui, les plus jeunes des fils du Roi ont pu voir la révolution qui a renversé un trône par jure ; ils ont pu éntendre les acclamations du peuple qui a porté leur pére sur le pavois national. Elevés au col lège , habitués au travail, soumis à la concurrence, façonnés à la discipline, les princes ont appris à respecter, dès leur plus tendre enfance , le rôle désormais réservé à l'intelligence dans les destinées de leur patrie. Placés à la tête d'une nation où l'égalité a nivelé tous les rangs, où la noblesse n'est plus qu'une décoration, où les ser vices font plus que les parchemins, ils ont compris que si la France leur a laissé un privilège , c'est celui de la servir au premier rang. Et ils étaient au premier rang devant Anvers , devant Constantine , devant Saint-Jean d'Ulloa. Ce n'est pas assez. Il faut encore qu'ils soient en avant du pays dans toutes les routes qui conduisent à sa prospérité matérielle et à sa grandeur morale. II faut qu'au mérite de l'officier, ils joignent les vertus et les talens du citoyen. En un mot, compatriotes d'une population belliqueuse par instinct et par nécessité , ils ont une destinée militaire à accomplir ; premiers-nés d'une révolution libérale , ils ne doivent jamais oublier qu'une partie de leur existence et de leurs facultés ap partient à l'accomplissement de devoirs purement civils. Ils font accidentellement partie de l'armée ; ils sont mem bres permanens de la cité. Le voyage que M. le duc d'Orléans a entrepris, il y a , quatre mois, et qu'il vient de terminer si heureusement, a eu ce double caractère. Militaire en Algérie , il a été essentiellement politique en France. L'armée connaissait M. le duc d'Orléans de longue date. Cette fois, c'est surtout au pays qu'il s'est montré , aux citoyens qu'il a parlé, aux intérêts civils qu'il s'est adressé ; et les inté rêts consultés lui ont répondu avec liberté et confiance. Comme soldat, le prince royal était connu. A une épo que où les occasions de gloire sont rares, il avait eu l'insigne bonheur d assister aux plus périlleuses épreuves de notre armée. Mais, excepté le petit nombre de per sonnes admises dans son intimité, qui savait si M. le duc d'Orléans avait l'intelligence des grandes affaires et le souci des sérieux intérêts du pays ? Qui l'avait en tendu parler ? Qui l'avait consulté ? Qui l'avait vu à l'œuvre ? Eloigné des conseils du Roi par la susceptibi lité toute constitutionnelle de l'illustre M. Périer, M. le duc d'Orléans n'y avait plus été appelé depuis huit ans. Il n'avait été mêlé , et nous l'en félicitons, à aucune de nos récentes querelles. Il était resté immobile au milieu du mouvement qui avait tout ébranlé autour de lui. Pour unique exercice de ses facultés éminentes, il avait commandé des camps ; mérite estimable en temps de paix , mais qui, en temps de guerre ,ne suppléerait pas aux qualités qui font le grand général. M. le duc d'Orléans devait enfin sortir de cette re traite silencieuse où se cachait sa vie. II devait renon-...
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
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