Extrait du journal
Deux déclarations, assez différentes • Hune de l'autre, mais intéressantes toutes lés deux, ont été faites hier, aux EtatsUnis. Elles ont trait l'une et l'autre au désarmement : la première est du secré taire d'Etat Stimson et la seconde du Président Hoover. . M. Stimson, parlant à Pittsburg, a dit fort justement que les efforts de toutes les nations doivent concourir pour le main tien de la paix et que le résultat désiré ne pourra être obtenu que si les EtatsUnis sont disposés à coopérer avec les autres pays.- Il a ajouté qu'en raison du pacte de la S. D. N. et du pacte Kellogg tout conflit armé intéresse de plein droit le monde entier. On doit savoir gré au ■secrétaire d'Etat américain dés efforts qu'il fait pour apprendre,, à ses compa triotes qu'ayant mis la guerre hors"la loi il ne leur est pas-permis d'assister, avec indifférence a un,acte d'agression. Mal heureusement il sait que îles Américains ne sont pas prêts à remplir le dievoir qui est implicitement commandé par le pacte Kellogg, qui, tant qu'il sera considéré comme un simple chiffon de papier, non seulement sera sans valeur, mais favori sera même tes Etats sans scrupules qui prépareront un coup de 'surprise contre ceux qui se croiront protégés par un texte solennel. C'est pourquoi i/ 1 tire une con clusion singulièrement faible du principe qu'il .pose : il n'envisage toujours qu'une consultation ©n cas de menace de guerre. Cette consultation sera, le moment venu, devancée par des événements foudroyants et fournira peut-être surtout aux 'chefs des Etats qui ne seront pas directement attaqués mille prétextes pour se tenir à •l'écart de la bagarre. Si les gouvernements ' craignent en temps de paix de s'engager ' à agir lorsque le pacte Kellogg aura été : violé, ils seront encore bien plus pusilla nimes à l'heure où le canon les fera déjà entendre. M. Stimson ajoute sans 'doute que les Etats-Unis refuseront de reconnaître toute acquisition territoriale résultant d'une''agression. (Mais c'est encore une garantie illusoire. Personne ne peut se figurer que, n'ayant pas voulu intervenir à ll'heure où il aurait été possible d'agir utilement, l'Amérique ferait la guerre au conquérant viotorieux. Devant les faits accomplis le monde trouvé plus commode de s'incliner. C'est avant qu'ils 'le soient qu'il faut entrer en lice. Le discours du secrétaire d'Etat américain ne marque donc aucun progrès. Son intérêt principal est de nous montrer que M. Stimson, dont les intentions sont certes bonnes, n'ose pas encore dire la vérité à ses auditeurs, à savoir qu'on n'empêchera la guerre qu'en convainquant tout agresseur éventuel qu'il sera mis à la 'raison par l'action ins tantanée de foutes les principales puis sances. M. Hoover, lui, a parlé plus directe ment de lia Conférence du désarmement. Il a cru devoir annoncer que, si elle échouait, l'Amérique exécuterait un grand programme naval, dans toute la mesure autorisée par les accords de Londres, « pour faire de sa marine l'égale de lia plus puissante du monde ». Ces derniers mots sembleraient indiquer que le prési-> dent voulait surtout exercer une pression sur l'Angleterre, dont la flotte est encore légèrement supérieure à celle des EtatsUnis, au moment où des conversations dé licates ont lieu à Londres. Toutefois, elles sont probablement destinées au monde, entier. L'Amérique considère qu'elle a droit à une situation dominante sur les mers. Les réductions qu'elle a pro posées auraient pour effet de lui per mettre de l'obtenir aux moindres frais, mais, de toutes façons, elle entend l'avoir. Quels cris d'indignation n'entendrait-on pas si un de nos hommes d'Etat se per mettait de parler d'une semblable façon ! On dénoncerait le militarisme français en se voilant la face. Nous ne conseillons pas à nos dirigeants de s'exprimer ainsi, mais nous croyons qu'ils feraient bien de ne pas nous déconsidérer et de ne pas affai blir notre cause en se donnant toujours l'apparence d'hommes qui ont à s'excuser et qui sont donc un peu coupables. Au lieu de proposer eux-mêmes l'affaiblisse ment de nos forces défensives comme si elles étaient excessives ! qu'ils disent hautement que, dans la situation actuelle de l'Europe et en présence de l'état moral et matériel de l'Allemagne, notre armée est la seule garantie sérieuse de la paix, ce qui est la simple vérité. Notre cause est si bonne qu'il suffirait d'un peu de franchise et de fermeté pour la dé fendre utilement. Si chaque jour elle pa raît un peu plus compromise, c'est qu'elle n'a pas été soutenue. Le courage est peut être ce qui manque le plus en ce moment chez nous. Malheureusement, c'est préci sément la défaillance des énergies chez les peuples pacifiques qui rend la paix précaire. PIERRE BERNUS....
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
En savoir plus Données de classification - stimson
- goethe
- norman davis
- mazarin
- herriot
- hoover
- jean de pange
- baldwin
- etranger
- hertzog
- france
- londres
- ottawa
- angleterre
- reich
- allemagne
- amérique
- francfort
- tokio
- europe
- kellogg
- parlement
- p. v.
- conférence du désarmement
- université de bonn
- bibliothèque nationale
- ambassade du japon