Extrait du journal

A ces vertus morales répondent de véritables vertus militaires : là-dessus aussi, il n'y a qu'une voix. On n'instruit pas moins aisément nos troupes noires qu'on les discipline.. Il faut, àla vérité, du temps pour en faire de bons tireurs et ce temps a manqué le plus souvent quand on les envoie au feu; de même, on ne les familiarise pas sans peine à la manoeuvre de notre canon à tir rapide, qui exige la lecture et le maniement d'appareils un pou compliqués pour des gens qu'il faudrait doter tout d'abord d'une certaine instruction primaire. Mais, en revanche, quelle merveilleuse aptitude native , pour le service en campagne, pour la ma nœuvre/ Ces «enfants de la nature» ont tôt fait d'apprendre à se défiler, à utiliser judi cieusement le terrain, à filtrer d'un couvert à l'autre, puis à tomber comme la foudre sur l'ennemi surpris. Au combat, il va de soi qu'ils sont magnifiques de bravoure, d'entrain et d'élan , la vie compte si peu pour les primitifs, et leur s'ang bouillonne de tant d'ardeur! On nous raconte que lorsque la lutte s'approche manifestement de son terme, que le feu, arrivé à son maximum> d'intensité, a produit son maximum dteffets, l'officier qui s'apprête à commandée l'assaut, voit presque toujours quelques tirailleurs se retourner en criant : « Baïonnette! baïonnette! » : Ils ont senti, d'eux-mêmes, que le moment de « l'at taque décisive » est arrivé, que l'heure de la charge a sonné. Quant à leur ténacité et à leur endurance physique et morale* elles font, en toute circonstance, l'admiration de leurs officiers ; leur constance est extraordinaire, non seulement dans l'offensive, mais encore dans la défensive, si déprimante de sa nature. Gela tient sans nul doute à leur insouciance na turelle et à leur fatalisme, ainsi transformés en précieuses qualités. Outre que leur confiance dans leurs chefs et dans les dispositions prises par ceux-ci est imperturbable, rien ne vient les impressionner : chez eux, comme chez les Japonais, la nervosité, cette plaie de nos ar mées —et de nos nations •—modernes, est to talement absente. Et c'est ainsi que l'on voit les fractions non directement engagées se reposer, en attendant leur tour, dans un calme et une sécurité absolus : elles réparent leurs forces que, chez des troupes nerveuses, l'anxiété de l'attente userait en les surexcitant....