Extrait du journal

C'est cette pensée des morts que M. Barrés a tenu à défendre dans un petit discours d'un ton vif et d'un sens profond, que l'Assemblée a écouté avec assez de déférence et un peu d'é tonnement. Il était bon que ce discours fût pro noncé, même devant un auditoire incompétent: Il pose la question morale qui domino ce débat. La loi qui est proposée à la Chambre ne Viole pas simplement les principes de droit public qui paraissaient le plus solidement établis dans ce pays ; elle constitue une entreprise de détour nement de la volonté dés mourants qui apparaît comme un véritable sacrilège ; elle se résume dans le dessein de confisquer, par des ru ses de procédure, l'effort accompli par l'homme pour se survivre, pour défendre sa croyance avec sa fortune, pour assurer, par ce pro longement de lui-même qui est son patri moine, ce prolongement de lui-même, qui est sa pensée. Elle reprend, à celui qui n'est plus là pour la défendre, la part de son hé ritage qu'il avait entendu consacrer à sa foi, à son église, à sa mémoire, et elle la re prend, non pas pour la rendre à ceux qui étaient unis ô lui par les liens du sang ou de l'amitié, mais pour la donner à des tiers inconnus. Pour apprécier ce qu'il y a de monstrueux dans une pareille tentative, la croyance, en vérité, est inutile ; il semble que la probité devrait suffire : Ces reliques du cœur ont aussi leur poussière Sur leurs restes sacrés ne portons pas les mains !...