Extrait du journal

les écueils les navires égarés dans l’obscurité, un autre homme sortait de la tour et s ■ mêlait aux naufrageurs, Une peau de loup couvrait ses robustes épaules. La tête d’un de ces animaux, alors si nombreux eu Bretagne, lui servait de coiffure et masquait presque entièrement son front et ses joues. Sa longue barbe brune cachait le reste de son visage. Cet homme, que nul ne connais sait dans le pays, avait hérité du nom de sa lugubre de meure. On l’appelait le Maudit. Il était de haute taille et paraissait jeune encore. Su force, sa hardiesse et son agilité tenaient du prodige. Tous ceux qui avaient es sayé de résister à sa volonté avaient payé cher leur au dace. Il inspirait une terreur d'autant i lus grande qu’on le regardait comme un échappé de l’enfer. « Aussitôt que le vent diminuait et que le pillage des navires jetés à la côte était terminé, le Maudit quiitait la grève et ne reparaissait qu'à la prochaine tempête. « C’était un mardi de décembre, quelques jours avant la sainte nuit de Noël. « Le soleil venait d’éteindre ses rayons dans les pro fondeurs de l’horizon brumeux. A travers les nuages épaix et orageux, la lune, dans son dernier quartier, laissait tomber sa pâle clarté sur l’écume argentée qui se tordait à la cime des vagues. Pas une étoile au ciel, pas un souffle d’air. Malgré les vapeurs salines de .la iner, l’atmosphère restait lourde et suffocante. On sen tait quo la nature, fiévreuse, oppressée, allait entrer dans une de ses plus terribles convulsions. Les éléments semblaient concentrer leurs forces et attendre dans un respectueux silence que Dieu, par le grondement de sou tonnerre, leur donnât le signal do se déchaîner. « Groupés au pied de la falaise à 5 ou t>00 pas de la tour, une vingtaine de paysans tenaient les yeux fixés sur le sombre édifice. — Voilà le magicien, s’écria l’un d’entre eux. Bénis soient Dieu et saint Elflam, nous aurons des naufrages...