Extrait du journal
encore un droit strict et rigoureux d’en user comme bon lui semblera. Si donc, en réduisant ses dépenses, il est arrivé à faire quelques épargnes, et si, pour s'en assurer la conserva-, tion, il les a par exemple réalisées dans un Champ, il est de toute évidence que ce champ n'est pas autre chose que le salaire trans formé : le fonds ainsi acquis sera la propriété de l’artisan, au même titre que la rémunération même de son travail. Mais, et ceci parait plus grave encore, le remède proposé est eu opposition flagrante avec la justice, car la propriété privée et person nelle est pour l’homme de droit naturel, IJ y a, en effet, sous ce rapport, une très grande diffé rence entre l’homme et les animaux dénués de raison. Ceux-ci ne se gouvernent pas euxmêmes ; ils sont dirigés et gouvernés par la nature, moyennant un double instinct, qui, d’une paît, tient leur activité constamment en éveil et en développe les forces ; de l'autre, provoque tout à la fois et circonscrit chacun do leurs mouvements. Bien autre est la nature humaine... Ce qui excelle en nous, qui nous fait .hommes et nous distingue essentiellement de la bête, c’est la raison ou l’intelligence, et, en vertu /de cette prérogative, il faut reconnaître à l’homme, non seulement la faculté générale d’user des choses extérieures, mais, en plus, le droit stable et perpétuel de les posséder, tant pelles qui se consument par l’usage que celles 'pui demeurent après noüs avoir servi. Une con sidération plus profonde de la nature humaine va faire ressortir mieux encore cette vérité. L homme embrasse par son intelligence une inti mité d'objets, et, aux choses présentes, il ajoute et rattache les choses,futures ; il est, d’ailleurs, le maître de ses actions ; aussi, sous la direction (de la loi éternelle et sous le gouvernement uni versel de la Providence divine, est-il en quelque sorte à lui-même et sa loi et sa providence. C'est pourquoi, il a le droit de choisir les choses qu’il (estime les plus aptes, non seulement à pour voir au présent, mais encorè au futur. D’où fi fchit qu’il doit avoir sous sa domination, non seulement les produits de la terre, mais encore la terre elle-même qu’il voit appelée à être, par sa fécondité, sa pourvoyeuse de l’avenir. Les nécessités de l'homme ont de perpétuels re tours : satisfaites aujourd'hui, elles renaissent demain avec de nouvelles exigences. Et qu’on n’en appelle pas à la providence de l'Etat, car l'Etat est postérieur à l’homme, et, avant qu’il pût se former, l’homme déjà avait ; reçu de la nature le droit de vivre et de pro téger son existence. Qu’on n’oppose pas non plus à la légitimité de la propriété le fait que 'Dieu H donné la terre en jouissance au genre humain tout entier, car Dieu ne l’a pas livrée 'aux hommes pour qu’ils la dominassent confu sément tous ensemble. Tel n’est pas le sens de icetté vérité. / Que fait l’homme en consumant les res sources de son esprit et les forces de son corps pour se procurer ces biens de la nature? Il s'applique pour ainsi dire à lui-même la por tion de la nature corporelle qu'il cultive, et y laisse comme une certaine empreinte de sa personne, au point qn’en toute justice, ce bien sera possédé dorénavant comme sien et qu’il ne sera licite à personne de violer son droit en n’importe quelle manière. Il : est permis de s’étonner comment certains itenants d’opinions surannées peuvent encore y contredire, en accordant sans doute à l’homme privé l’usage du sol et les fruits des champs, mais en lui refusant le droit de posséder eu qualité de propriétaire ce sol où il a bâti, cette portion de terre' qu’il a cultivée. Ils ne voient donc pas qu’ils dépouillent par là cet homme du fruit de son labeur ; car, enfin, ce champ remué avec art par la main du cultivateur a changé complètement de nature : il était sau vage, le voilà défriché ; d’infécond, il est de venu fertile ; ce qui l’a rendu meilleur est Inhérent au sol et se confond tellement avec lui qu’il serait en grande partie impossible de l’en séparer. Or, la Justice tolérerait-elle qu’un étranger vint alors s’attribuer cette terre (arrosée des sueurs de celui qui l’a cultivée ? De même que l’effet suit la cause, ainsi est-il (juste que le fruit du travail soit au travailleur. C’est donc avec raison que l’universalité du genre humain, sans s’émouvoir des opinions contraires d’un petit groupe, reconnaît, en con sidérant attentivement la nature, que dans se3 lois réside le premier fondement de la réparti tion des biens et, par la coutume de tous les siècles, a sanctionné la propriété privée comme (conforme à la nature de l’homme et à la vie calme et paisible des sociétés. — De leur côté, les lois civiles, qui tirent leur valeur, quand elles sont justes, de la loi naturelle, confirment ce même droit, et le protègent par la force. — Enfin, l’autorité des lois divines vient y apposer jSfin sceau, en défendant, sous une peine très grave, jusqu'au désir même du bien d’autrui. Ttt ne convoiteras pas la femme Ae ton pro chain, ni sa maison, ni son champ, ni sa ser vante, ni son hxuf, ni son âne, ni rien Ae ce qui est A lui. Il était nécessaire de faire cette longue citation, parce qu’elle est la réfutation et la condamnation du principe fondamental, de l’objectif essentiel du socialisme. Sa haine profonde contre l’Eglise catholique vient du reste de cette formelle opposition....
À propos
La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.
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