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La Croix, 12 novembre 1902

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La Croix
12 novembre 1902


Extrait du journal

M. Combes est, paraît-il, confondu de voir l’autorité de l’arbitrage du Pas-de-Calais et du Nord méprisée par les grévistes. Aussi, daignant enfin s’apercevoir que le travail n’est pas libre dans ces régions, il prend, assure-t-on, des mesures rigoureuses pour faire respecter sa liberté. Pas moins de dix mille hommes de diverses armes seraient mobilisés ! A leur tour, les grévistes éprouvent une grande surprise : iis ont peine à comprendre que les. rassemblements, les troubles, les désordres, les coups aux travailleurs, le chambardement de leurs demeures, les fessées à leurs femmes, toutes choses per mises hier, sont interdites aujourd’hui. En réalité, ce n’est pas la liberté du travail que M. Combes se décide à faire respecter, c’est l’autorité de l’arbitrage; ce n’est pas même l’autorité de l’arbitrage, c’est l’auto rité de l’arbitre qu’il a désigné, c’est — ce qu’il y a de moins respectable en dehors de la très respectable liberté du travail et de la non moins respectable autorité do l’arbi trage, — c’est lui-même. La confusion de M. Combes témoigne une fois de plus que cet homme d’Etat n’a pas le don de prévision. Quand lui et ses amis ont employé les trois dernières années à enseigner et à pra tiquer le mépris des verdicts des tribu naux militaires; quand les jugements des tribunaux civils sont chaque jour bafoués et traités d’actes de rébellion par la presse ministérielle; quand M. Combes lui-même passe outre ces sentences ; quand il n’y a pour lui de graves et de respectables que les vingt jugements et arrêts rendus par le tribunal et la Cour de Paris en faveur de Mme Humbert contre des adversaires fictifs et par un testament que nul n’a jamais vu, par cette bonne raison qu’il n’a jamais existé ; quand l’exemple du mépris de toute autorité judiciaire a été -ainsi donné par les hommes au pouvoir, ceux-ci ne sont nulle ment fondés à s’étonner du mépris de l’au torité de l’arbitrage, affiché par les grévistes; ils ne sont surtout nullement qualifiés pour le réprimer. M. Combes a posé le principe : nulle auto rité n’est respectable, sauf la sienne. Les grévistes ont adopté le principe, sans admettre l’exception; ils méprisent toute autorité, même celle du président du Con seil, coupable de leur avoir nommé un arbitre qui leur a donné tort. Certes, l’illogisme n’est pas de leur côté, et nous neconsenlirons à leur jeter la pierre qu’après avoii lapidé M. Combes, l’entreteneur de leurs illusions, le fauteur de leurs entraves à la liberté du travail et de leur mépris de toute autorité, l’auteur de leurs déceptions, qui prétend se faire le justicier des fautes qu’il a encouragées, des crimes et des délits qu’il a favorisés, des révoltes sociales auxquelles il a excité, mieux encore, auxquelles il a participé par exemple, en seignement, conseil et complicité. J. B....

À propos

La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.

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