Extrait du journal
manque, de logique et de mesure abou tissant à l’incohérence et à l'impuis sance se manifestent dans les autres préceptes de morale dont se targue M. Bayet pour montrer la supériorité de la sienne. Si vous aviez consulté mon petit Manuel, dit-il encore, vous auriez lu que « tuer un homme est le plus grand de tous les crimes », et, plus loin, que « le vol est une des fautes les plus graves qu’on puisse commettre ». Nous pourrions répondre une fois de plus : Prouvez donc ces deux proposi tions d'après vos .principes; Prouvez que vos définitions des actions bonnes et mauvaises comportent logiquement ces interdictions. Et je vous en défie. Mais il y a mieux. Le premier de ces préceptes : « tuer un homme est le plus grand de tous les crimes », donné sans précision, sans distinction de cas et d’espèces est une fausseté. A le prendre tel qu’il est, l’en fant primaire conclura que M. Deibler est le plus grand de tous les criminels, que les policiers qui tuèrent les bandits furent aussi criminels qu’eux, que l’homme attaqué qui se défend en tuant son adversaire est aussi coupable que l'agresseur. Bien pis : si l’e®fant est docile à vos leçons et les retient, il ne comprendra pas, plus tard, pourquoi on lui met dans les mains un fusil; La patrie qui lui ordonne le plus grand, de tous les crimes ! A bas l’armée ! A bas la patrie ! Voilà la conclusion logique qu’il tirera de votre précepte absolu et simpliste. ' • Est-ce cela, que vous voulez ? Et le vol ? . €?est toi que >M. Bayet nous attend, posté au coin du maquis de la casuis tique, brandissant en guise de tromtolon un désuet Traité de théologie dogmatique et morale. De ce bouquin, déniché je ne sais-où, il fait ses délice©. Il le cite à tout propos, paraît-il. L’autre jour, il en servait une tranche ou deux aux doctes lecteurs du Matin, bien qualifiés, comme on sait, pour en faire une sage interpré tation critique. îl nous en baille une colonne d’ex traits morcelés, tronqiiés, sans tenir compte du contexte qui précise le sens ou énumère les exceptions. Nous n’avons ni la pjace ni le loisir d’entamer avec notre contradicteur une controverse à fond. ’ , , Relevons seulement ce point concer nant-le vol.- - , ' ’’ M. Bayet est suffoqué de ce que là morale chrétienne admette qu’en « cas de nécessité extrême ou voisine de l’ex trémité. il est permis de dérober le bien d’autrui, sauf dans le cas où le proprié taire souffrirait de la même nécessité ». Parfaitement, Monsieur, et vous ou tragez la morale laïque, vous la pré sentez comme une loi féroce, inhumaine et barbare s’il est vrai qu’elle ne com porte pas la même exception et la même tolérance. Comment ! Voilà une mère dont l’en fant meurt de faim. Si dans une heure elle ne liui a pas donné un morceau de pain, le petit martyr aura rendu le der nier soupir et ne sera plus dans ses bras qu’un cadavre. Et vous prétendez, vous, laïques, que cette femme, cette mère, commettra « une des fautes1 les plus graves qu’on puisse commettre » si, d’un geste éperdu, elle s’empare d’un petit pain à Eoriée de sa main, d’une pomme déroée au verger, voisin paur sauver la vie de son enfant ? La morale de Jésus-Christ n’a pas de ,ces rigueurs inexorables. Gomme la vôtre, elle dit que le vol est défendu et elle en donne, des motifs qui s’imposent autrement que les vôtres à la con science humaine, mais elle dit que dans des cas sembables il n’y a pas vol, et que le souverain Maître de toutes choses, eu vertu de son souverain domaine, autorise une suspension partielle et mo mentanée des lois qui garantissent, la propriété privée. Bile admet en faveur de cette malheureuse le jeu d’une loi supérieure d’expropriation à laquelle le propriétaire ne saurait légitimement s’opposer. Voilà notre morale. Si la vôtre n’ad met pas cela, si les lois d’airain ne se plient pas devant les suprêmes détresses, tant pis pour elle. Cela prouve que tout ce qui est contre Dieu tourne toujours, une fois ou l’autre, contre l’homme. ■Pour conclure, vous dite© que la Croix accuse l’école laïque d’enseigner le meurtre et le vol. C’est inexact. Ne sac cagez pas notre pensée comme vous massacrez la théologie. Nous disons seulement qu’à prendre vos principes, à vous, et à les suivre jusqu’au bout, on trouve l’explication et l’excuse de tous les excès. Et comme l’école, après tout, a mission d’armer l’homme de demain contre ses penchants et contre tous les entraînements, nous disons qu’en se servant de vos Leçons de morale, elle met entre les mains des élèves des armes mauvaises et dangereuses que les évêques ont à bon droit condamnées. Ctr....
À propos
La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.
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