Extrait du journal
MM. Briand, président du Conseil, et Ruau, ministre de l'agriculture, ont inauguré, hier, à Périgueux, un mo nument élevé aux enfants de la Dor dogne, morts pour la Patrie. Ils ont été accueillis par une mani festation enthousiaste. A midi et demie a eu lieu un grand banquet à l’issue duquel M. Briand a prononcé un magnilique discours qui aura un retentissement considérable dans le pays. M. Briand commence par dire qu’il se lève sous l’iniluence de l’émotion profonde qu’a produite en lui la récep tion si cordiale, si chaleureuse et en même temps si démocratique qui lui a été faite, à lui-même ainsi qu’à son collaborateur et ami M. Ruau. 11 poursuit en rappelant que lorsque les représentants de la Dordogne sont venus l’inviter à présider cette belle manifestation républicaine et patrio tique, il a accepté avec empressement, heureux qu'il était de pouvoir tenir la promesse qu’avait faite son éminent prédécesseur de venir, à la veille de la rentrée des Chambres, s'entretenir avec les bons républicains do ce dépar tement de l'œuvre passée et de l’œuvre à venir. « Je regrette, ajoute M. Briand, que ce ne soit pas lui qui se trouve ici. Je le re grette pour vous, mais aussi dans un sin cère esprit de justice ; il eût été en effet plus qualifié, plus autorisé que moi pour exposer tous les elïorts accomplis dans le but de réaliser un programme qui est le mien et que je continuerai demain. (Ajgdaudissemenls). — Vous savez Messieurs, eu présence de quelles difficultés s’est trouvé mon prédé cesseur au pouvoir et quelle vaillance il a fallu à ce vieux républicain pour en venir à bout f.Vouveau.c applaudissements. Cris de : Vire Clemenceau). Son œuvre, nous avons entrepris de la continuer avec l’accord de tous les répu blicains. Cette œuvre nous l’activerons si notre existence est durable. (On crie dans la salle : « Oui! Uni! ».) Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, nous avons été émus par l'atmosphère de confiance et de sympathie dont nous avons été entourés, nous avons été joyeux et in quiets à la fois : joyeux, parce que nous y avons vu une garantie de la constance et de l'affection populaires pour le régime répu blicain. Nous en avons été inquiets parce que nous nous sommes demandés si nous aurions la forci1 et la valeur nécessaires pour justifier cette confiance. Deux mots ont été prononcés au début de notre gouvernement qui ont produit un effet énorme, presque magique : « Apaisement, détente ». Aussitôt, la confiance nous est venue. Pourquoi f Parce que nous sommes à une heure où le pays sent un besoin pres sant, irrésistible d’union, de concorde et de fraternité. 11 comprend que si beau dans son passé, si grand dans son présent, si grand aussi dans son avenir, il ne peut réaliser son plein destin pour lui-même et pour l’humanité entière qu’à la condition que soit finie l’époque des luttes fratricides entre ses enfants* (Applaudissements et acclama tions). Il faut s’expliquer ici en toute franchise. Je ne crois pas à la magie des grands dis cours politiques ; je ne crois pas qu’il soit possible d’enfermer dans les formules d’un discours le présent et l’avenir d’un pays. Je sais bien que les paroles ne valent pas les actes mais il est nécessaire à un homme nouveau dont on a besoin de connaître toute la pensée de parler, surtout lorsqu’il vient comme moi au pouvoir dans des conditions un peu exceptionnelles. J’ai donc le devoir de m’expliquer. Pendant trente-neuf ans, la République, maintenue avec force par le pays, a été contestée par quelques-uns ; alors, elle lut obligée de grouper autour d’elle tous ceux qui l’aiment, non pour la formule, mais pour ce qu elle contient. H y a eu des luttes. 11 y a ou des cadavres ; mais il arrive un moment où il est nécessaircde faire entendre des paroles de frater nité, et ma joie est profonde de penser que je pourrai être l’homme de cette mission. Car il n’est pas de prospérité durable dans les luttes et les déchirements. Si je cherchais à me maintenir à la faveur des luttes intestines je serais un misérable. Nous voulons rendre la République si agréable â habiter, nous voulons l’élever si haut au-dessus des partis, que ce soit la France entière qui rayonne en elle. Dans une précédente législature, j’ai été partisan d’une grande réforme, dans laquelle était le germe des divisions entre les cons ciences. Cette question une fois réglée, alors,pour les hommes de bonne volonté, il n’y a plus de raisons valables d’entrevoir des luttes fratricides. On a dit aux catholiques que leur liberté d’aller à l’église serait entravée. Eh bien, ils ont pu constater que les églises sont toujours ouvertes, et depuis, rien n’a pu nous faire départir de notre calme. De certains côtés, on ne voulait pas de notre justice : on aurait voulu voir notre république tyrannique. Elle ne l’a pas été. Nous avons même reculé un peu dans certains cas, et nous n’en éprouvons pas de regret. Nous avons démontré que la loi ne con tenait ni pièges, ni traquenards. Le pays le sait maintenant, il ne reviendra pas sur son jugement. Il s’agit à présent de réaliser la Répu blique. Nous avons à accomplir un certain nom bre de réformes. Nous ne sommes pas de ceux qui courut après plusieurs réformes à la fois. . C’est un travers de notre démocratie d ou blier l’œuvre accomplie. C’est une course au progrès qui empêche le peuple de se rendre compte de ce qui a été fait pour lui. On a donné aux ouvriers la loi des pru d’hommes, celle de l’inspection du travail...
À propos
Fondée en 1893, La Dépêche du Berry était un journal régional suivant une ligne éditoriale de centre-gauche, ou « radicale ». Il paraît jusqu'en 1944.
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