Extrait du journal

L'affaire de la Sarre n'est pa: seulement grave en elle-même, ell< est grave comme le signe d'une contradiction qui tend à se généraliser et à troubler toute la vie européenne. Il y a aujourd'hui deux Europes : celle où le suffrage universel est libre, et celle où le suffrage universel est soumis à la direction de l'Etat totalitaire. Toutes les dictatures qui existent en Europe ne sont autre chose que des machines pour organiser et diriger le suffrage universel. Mais cette différence entre l'Europe à suffrage universel libre et l'Europe à suffrage universel dirigé est beaucoup plus profonde et dangereuse que la division de l'Europe monarchique et de l'Europe républicaine, qui a troublé s plusieurs reprises le dix-neuvième siècle. Aucune entente sérieuse entre ces deux Europes n'est et ne sera possible; il ne peut et il ne pourra y avoir entre l'une et l'autre que des compromis pénibles et précaires, parce que l'une, sous l'apparence de l'appliquer diversement, nie en réalité le principe de droit sur lequel l'autre veut bâtir l'ordre intérieur de chaque Etat et l'ordre international, c'est-à-dire la paix....