Extrait du journal
J'en ai un sous les yeux qui est très pieux et qui imprime • tous les jours dans sa manchette le gibet du Christ. Il écrit : « Ces paroles (des paroles de Pie^ X) les plus magnifiques qui aient jamais été prononcées sur la France, et que l'on croirait extraites du livre d'isaïe, nous disent, dans une lumière prophétique (c'est moi qui souligne le mot) dopt les événements actuels vérifient la portée divine, que la France de demain sera une nouvelle France redevenue la vraie France (c'est toujours moi qui souligne), la France de Jeanne d'Arc, de saint Louis, de Clovis. Plus ds France persécutrice, demain; plus de France défigurée dans son génie comme dans ses merveilleuses qualités d'apostolat et devenue l'apôtre de la révolution dans le monde. Mais la France du baptistère de Reims; la France, fille aînée de l'Eglise; la France, nation prédestinée; la France, vase d élection; la France, divin génie de l'apostolat (bis) catholique, renouant ses gracieuses traditions, et s'en allant, comme par le passé, porter le nom du Christ devant tous les peuples et les rois de la terre. De quelles csp{'(lIJ(;es nos poitrines ne d'oia vent-elles pas être gonflées, à la pensée d'un gel avenir, si rapproché, et d'une telle certitude, que c'est presque déjà le présent? » Or, il n'est défendu à personne de faire des projets. Mais il serait peut-être sage et expédient d'avoir, -pour le merent, des projets moins bruyants. Si la France de Clovis est sur la ligne de feu, la France de la Révolution y est elle-mê'me. L'athée donne sa peau comme le croyant, le protestant et l'Israélite comme le catholique. Tous les « poilus » ne se confessent pas, tant s'en faut. Ceux qui font leurs délices de M. de Voltaire doivent être beaucoup plus nombreux que ceux qui cherchent leurs directions et leurs consolations dans Joseph de Maistre. Les sacs de nos soldats, si on les alignait constitueraient la bibliothèque la plus variée. On y trouverait beaucoup de petits livres que la Sacrée Congrégation des rites a depuis longtemps mis à l'index. Tant pis pour ces enfants égarés 1 s'écriera peut-être le journal qui paraît tous. les jours avec la plus sensationnelle des manchettes. Oui, mais la courtoisie puérile et honnête commanderait, ce nous semble, un peu plus de discrétion. Ou nous nous trompons fort, en effet, où il n'est pas très poli, ni très généreux d'ailleurs, de dire à tous les républicaine (c'est-à-dire à la grande majorité des soldats) qui offrent actuellement leurs poitrines aux belles boches : « Battez-vous, mer, enfants ! Versez votre sang ! remportez la victoire! Pendant ce temps, nous qui avons l'horreur des institutions d mocrat'ques, nous nous employons, à l'abri de l'union sacrée, à démolir la maison bâtie par vos pères et aménagée par vous. Vous avez quitté la France de la P.épublicue; ceux de vous qui auront le bonheur de rentrer retrouveront la £ rance de saint Louis. » Grand merci, mais patientez un peu, de gr&ce ! L'union sacrée est une manière de moratorium. Pour donner congé à la République, attendez que la guerre soit finie et que les républicains mob lisés aient fait connaître leur intention en ce qui concerne la résiliation ou le renouvellement du b il ....
À propos
La Dépêche est un quotidien français régional fondé à Toulouse le 2 octobre 1870 sous l’initiative d’ouvriers de l’imprimerie Sirven. Par ses plumes, le journal s’inscrit dès ses débuts dans une mouvance de gauche, Jean Jaurès et Georges Clemenceau y sont très engagés politiquement par exemple, et le journal finit par s’affirmer en faveur de la révision du procès Dreyfus. Maurice Sarraut, membre du Parti radical-socialiste, en devient propriétaire en 1932.
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