Extrait du journal
leur plaise de »’a e monter le Cinq et de faire baisser , trois. C’est là la meule que le pays financier est condamné à mettre en mouvement ; c’est là la manivelle ridicule que la France démocratique est condamnée à tourner. Ce n’est lus même de l’agiotage, c’est de l’onanisme. A côté, en dessous des grandes puissan ces financières qui s’en prennent au Trois et au Cinq pour cent, nous avons ensuite les petits groupes, les petits industriels, qui s’attaquent à des objets de moindre importance. L’un jettera son dévolu sur l’obligation Egyptienne, l’autre sur la Franco-Hollandaise, un troisième sur le Mobilier espagnol ou l’Autrichien, jusqu’à ce qu’on en vienne à l’ancien Rivoli ou au Honduras. Le procédé e t bien simple ; pendant huit jours, on achète de toutes mains et à tous prix ; la presse est généreusement in vitée à proclamer la soudaine résurrection de telle ou telle valeur dont on avait pres que oublié le nom, et, sans se faire trop prier, elle crie au miracle; l’argent que le bon public, ne sachant qu’en faire, a versé en dépôt chez ses banquiers, est mis en réquisition pour raréfier le titre et faire hausser les cours ; au besoin, des ordres partis de Paris nous reviennent par la voie de Londres ou de Berlin; il n’y a plus à s’en dédire, décidément l’Europe ellemême s’intéresse au sort de la tonnel lerie mécanique et des pierres lithogra phiques; tout le monde finit par y croi re; ce qui -est si général doit forcément être vrai ; ce que l’on s’arrache avec tant d’ardeur doit être excellent ; le public, mouton de Panurge, veut aussi avoir sa part du gâteau ; on lui vend dans les hauts cours ce qu’on a acheté à vil prix, en pré vision do sa naïve cupidité ; et le lende main, tout s’effondre, la nouvelle éiait fausse, la combinaison si mystérieusement préparée a raté, la merveilleuse fusion est ajournée aux calendes grecques ; le titre a*changé de main, l’argent a changé de poche ; c’est bien, on recommencera le mois prochain. C’est à ce jeu-là, c’est à ce piétinement, c’est à cette exploitation sur place de la confiance publique, que s'emploient toutes les forces vives de notre monde financier; temps, capital, intelligence, rien n’y est épargné. Mais, dira-t-on, de quoi vous plaignezvous ? Ce n’est après tout qu’un simple dé placement de la richesse. Oui, en effet ; nous voici sur une grande route ; des voyageurs y circulent, les uns vont à la foire prochaine, les autres en reviennent, tous ont leur sacoche bien garnie ; des hommes sortent de derrière un escarpement du chemin, l’on sait ce qui s’ensuit ; ce n’est ausri qu’un simple dépla cement de la richesse. Pourquoi se plain dre ? Mais ces procédés sont surtout regret tables à cause de l’immense déperdition de forces qu’ils occasionnent et des tristes appétits qu’ils développent. Tant que l’a giotage sera : tout, les véritables affaires seront; rien. Pourquoi user son intelligence à éludier une affaire sérieuse, lorsqu’il est si aisé de gagner quelques millions eu en créant une tout imaginaire et mensongère? Ne demandons pas à nos financiers plus de vertu qu’ils n’en peuvent donner. Et du public que faudra-t-il en attendre, lorsqu’il se sera habitué à ces poignantes émotions de la roulette du Trois et du Cinq pour cent; les bénéfices que promet le travail paraissent bien pâles à côté des séductions du tapis vert. Depuis bien des mois, les caves de la Banque de France sont encombrées de leurs milliards; qu’on nous cite quelque grande entreprise que nous ayons mise en train; qu’on nous cite un large courant d’affaires auquel nous nous soyons asso-...
À propos
Lancée en 1862, La France était un quotidien suivant une ligne éditoriale à la fois libérale et favorable au Second Empire. Durant la Commune de Paris, le quotidien publia également une édition départementale imprimée à Tours. En 1874, Émile de Girardin, fondateur de La Presse et grand entrepreneur médiatique également proche d’Adolphe Thiers et de Gambetta, rachète le journal. Sur quatre pages, on y écrit de longs articles, en plusieurs parties, qui s’étendent parfois même sur plusieurs jours.
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