Extrait du journal

Mlu de Baillencourt est restée absolu ment elle-même ; elle est entrée sans aucune recherche dans son personnage et s’y est montrée tout à la fois simple et naturelle, absolument distinguée sans aucun effort, et, suivant une expression entendue dans la foule qui l’acclamait, elle était digne et fière, comme il con venait. En un mot, elle ne jouait pas un rôle, elle le remplissait ; et, tout autour d’elle, cette attitude imposait à tous la dignité et le respect. Et chacun la suivait des yeux, gar dant dans son cœur comme le souvenir d’une apparition inoubliable ; nous avions vu, nous avions contemplé la pieuse et vivante imago de celle en qui se concentrent en ce moment toutes nos espérances et nous emportions précieu sement cette réconfortante illusion. Nous ne l’oublierons pas et nous con serverons une profonde reconnaissance pour celle qui a bien voulu nous la pro curer. Je n’ajouterai rien, à ce qui a été rapporté sur la fête, le tournoi et le carrousel. On sait que M. FournierSarlovèze, maire de Compiègne d’une Jiart, et M. le colonel comte de CosséIrissac de l’autre, se sont consacrés avec un dévouement absolu, à ce qu’ils considéraient avec raison comme une grande œuvre ; ils ont fait merveille et les justes éloges ne leur ont pas man qués. Ils avaient su, du reste, so procu rer le concours de la ville de Compiègne tout entière ; ils avaient réuni une troupe de beaux chevaliers de haute et noble stature qui portaient vaillamment l’armure et qui tous étaient d’excellents cavaliers. Chacun était à sa place de la manière la plus intéressante, dans celle reconstruction, depuis le Roi et ses grands dignitaires jusqu’aux types des différents corps de métiers, jusqu’au dernier des arbalétriers et des nommes d’armes, jusqu’à ces très pittoresques dames de la halle, qui semblaient se souvenir que leurs pareilles ont su jouer quelquefois un rôle important, à diffé rentes époques de notre histoire. Et maintenant, mon cher ami, par courez le récit do toutes les fêtes don nées,depuis le 18 avril, en l'honneur de Jeanne d’Arc. Depuis la merveilleuse réunion de 40.000 catholiques venus à Rome, pour affirmer leur attachement à l’Eglise et leur espérance infinie dans l’intercession de la nouvelle patronne de la France, jusqu’à la grandiose ma nifestation du 16 mai à Notre-Dame ; voyez ce qui se passe chaque jour en ce moment dans les grandes villes, comme dans les plus petites bourgades ; vous retrouverez partout, l'attitude que j’ai signalée à Compiègne. Partout on fête et on exalte Jeanne d’Arc et partout son souvenir excite un enthousiasme sans précédent. Partout les manifestations organisées en son honneur ont le même caractère do grandeur, de dignité, et de patrio tisme. Partout elles inspirent un extrême désir d’action et de sacrifice; bon gré, mal gré, on se sent entraîné, pénétré d’une émotion surnaturelle, on est irré sistiblement attiré vers Jeanne, guerrière et sainte. Les cœurs et les pensées se tournent vers elle. Tout le monde attend d’elle un don de joyeux avènement; et...