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La Libre Parole, 5 mai 1905

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La Libre Parole
5 mai 1905


Extrait du journal

Quelques amis de Pierre Biétry, — que Pierre Biétry lui-même trouve sans doute bien ombrageux — me cherchent noise. Il s’agit de la réunion de la salle d'Athènes, où Pierre Biétry, Fernand Conty et moi avons, à des points de vue différents, traité la question des rapports entre ouvriers et patrons. Cette réunion a causé dans les milieux syndicalistes un remous qui dure en core. C’est à propos du discours que j’y ai prononcé que je suis pris à partie, dans des articles dont la courtoisie n'est pas exempte d'aigreur. On me prête les plus noirs desseins ; on laisse entendre que j’ai tenté, par une ha bile manœuvre, d’inféoder les troupes de Biétry au parti antisémite et M. Alfred Poizat — quelle mouche le pique? — va jusqu’à dire que j’ai voulu « mettre le mouvement jaune dans la poche de Drumont 1 » Je ne prends pas la chose au tragi que. Je la prends cependant au sérieux, car c’est avec de telles insinuations qu’on empêche les unions fécondes et qu’on prépare les pires malentendus. Et tout d’abord, je m’étonne que M. Alfred Poizat, qui n’est pas un es prit superficiel, ait pu si complète ment se méprendre sur nos intentions et sur nos idées? Comment a-t-il pu, par exemple, commettre cette erreur fondamentale, qui enlève toute jus tesse A ses critiques, de considérer l’Antisémitisme comme un parti ? Non, l’Antisémitisme n’est pas un parti. La meilleure preuve, c’est qu’il y a des républicains antisémites, des royalistes antisémites, des impérialis tes antisémites. C’est ravaler notre action que de dire que nous consti tuons une faction politique spéciale. L’Antisémitisme est tout autre chose. C’est une idée et c’est un sentiment ; c’est une force, la force française par excellence. Elle n’est pas un parti, mais elle est destinée à les pénétrer tous. A la réunion de la salle d’Athènes, j’ai, de mon mieux, analysé cette force, dans sa substance et dans ses mani festations. J’ai indiqué comment elle était née ; j’ai essayé, en suivant ses développements, d’abord dans les livres de Drumont, puis dans les évé nements contemporains, de prouver qu’elle avait pour principe le devoir, incombant aux individus comme aux peuples, de se soustraire aux influen ces étrangères, de rester soi. Ceci établi, j’ai montré l’application féconde qu’on en pouvait faire, sur le plan ethnique, sur le plan économique, sur le plan politique et sur le plan social, non pas au bénéfice de telle ou telle forme particulière de gouverne ment, mais au bénéfice de la collecti vité nationale. Comparant enfin A ces données la pensée directrice et les résultats déjà acquis du mouvement syndicaliste jaune, j’ai dit — et je ne m’en dédis point — que ce mouvement, s’il est vraiment un effort d’entente, sinon de réconciliation, entre le patronat et le prolétariat, se rattachait par son but au mouvement antisémite. ' Et il s’y rattache si bien, en effets qu’en cas de succès il ne peut avoir d’autre résultat que de refaire, au point de vue social, ce que les Juifs s’ingé nient A défaire. Ce sont les Juifs qui ont créé, pour s’en servir au profit de leurs spécu lations et de leurs coups de Bourse, l'antagonisme actuel des ouvriers contre les patrons, comme ce sont eux qui, pour asseoir leur pouvoir sur nos divisions, entretiennent la lutte entre cléricaux et anticléricaux. Le véritable ennemi du travailleur, ce ne sont pas les patrons qu’il voit et qui ne sont eux-mêmes souvent que les tributaires de la Haute-Ban que, c’est le Juif anonyme qu’il ne voit pas. Dissiper l’équivoque, réconcilier le patron avec l’ouvrier, c’est donc faire acte d*Antisémitisme et par IA le mou vement jaune continue l’œuvre de Drumont. En constatant cela, j’ai constaté un fait, ni plus ni moins. Biétry d’ail leurs en me serrant chaleureusement la main après mon discours me dit ces mots : « Nous sommes bien d’accord!» Et c’est parce que j’ai, en toute sincérité, proclamé cette vérité qui crève les yeux de tous qu’on me prête une intention de bas politicien, qu’on me reproche d’avoir cédé, à je. ne sais...

À propos

Fondée par le polémiste Édouard Drumont en 1892, La Libre Parole était un journal politique avançant des prétentions « socialistes », quoique son anticapitalisme populiste marqué se nourrissait essentiellement de liens présumés entre le capital et la communauté juive. Le journal répandait un antisémitisme virulent à travers de brutales diatribes et des unes sensationnalistes dénonçant quotidiennement des « conspirations ».

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