Extrait du journal
Une question vient d'être posée, comme tous les ans, à l’époque de la rentrée des théâtres. Un certain nombre d’auteurs se sont plaints de la présence des critiques aux répétitions générales cl aux premières. « Nos pièces, ont-ils dit, sont jouées devant ceux qui doivent en rendre compte au public par des acteurs dont la mémoire est encore peu sûre. Certes scènes ne filent pas comme elles fileront nécessairement à la quatrième ou à la cinquième représentation, quand elles seront mieux sues, quand les effets seront mieux assis, quand les acteurs se sentiront mieux les coudes et auront acquis plus d’assurance. » Les critiques voient donc nos pièces à un moment où elles ne donnent pas toute l'impres sion qu'elles sont susceptibles de produire,^ils n'en disent pas conséquemment tout le Bien qu’elles méritent et le public-, accueillant leurs opinions, n'assiège pas les bureaux de location f en aussi grand nombre que nous le désirerions. » A cela, tes critiques ont répondu, comme tous les ans : « Arrangez-vous pour répéter un peu plus long temps vos pièces et ne nous donner, à la répéti tion générale, qu'une pièce sue sur le bout du doigt et minutieusement étudiée. Au surplus, nous croyons être capables de deviner ce qu’une scène donnera, même quand elle ne donne pas son plein effet, par suite de défauts de mémoire ou de flottements de jeu inséparables d’une pre mière représentation devant le public. Sans être des aigles, nous ne croyons pas être foncièrement des crétins. « Dans tous les cas, par ce temps d’information à outrance, nos directeurs, comme le public, tien nent essentiellement à ce que le compte rendu de vos pièces paraisse, coûte que coûte, le lende main de chaque première. » On nous interdirait la salle aux répétitions générales et aux premières que nous nous fe rions renseigner sur vos pièces par lus acteurs et les actrices, — généralement si peu indulgents poui* les auteurs, surtout quand le rôle qu'on leur a infligé ne leur plaît pas, — par le souf fleur au besoin, par le garçon d’accessoires à la rigueur. Et celui-là sera gentil pour vous, si vous ne lui avez pas donné un pourboire suffi sant, vous pouvez m on croire ! » La réforme, — si c’en est une ! — demandée par certains auteurs, était donc déjà difficile à appliquer. Elle est irréalisable depuis qu'ils ont précisé le jour destiné par eux à la critique : la huitième représentation ! Ça, voyez-vous, c’était le bouleversement des bouleversements ! Aucune révolution, pas même celle de 93 n’eût affolé davantage ce petit clan qu’on appelle le Tout Paris des premières qui n’est sans doute pas une élite intellectuelle, mais qui tient à tout ce qui constitue son privilège comme ù la prunel'e de ses yeux. Du premier coup, son titre disparaissait, sim plement ! Il devenait le Tout-Paris des huitièmes 1 Jamais il n’aurait accepté cela, surtout les femmes ! Gelait la déchéance. C’était la copi as diminulio. C’était la fin d'un monde, peutêtre la fin du monde. Vous voyez une Parisienne disant à une de ses amies : — Moi, ma chère, je vais à toutes les huitiè mes !... N’y va pas qui veut, même en payant !... — Ni à la représentation gratuite du 14 juillet, ma chère ! répondrait 1 autre. Est-ce qu’on faisait aussi queue depuis la veille au soir ? Les actrices réserveraient leur robe fictive pour la huitième, afin d’être dans tous leurs avantages, la rob® constituant aujourd’hui la moitié des élé ments du succès d’un rôle féminin et le couturier ayant souvent plus d’esprit et de poésie que l'au teur....
À propos
Fondée par le polémiste Édouard Drumont en 1892, La Libre Parole était un journal politique avançant des prétentions « socialistes », quoique son anticapitalisme populiste marqué se nourrissait essentiellement de liens présumés entre le capital et la communauté juive. Le journal répandait un antisémitisme virulent à travers de brutales diatribes et des unes sensationnalistes dénonçant quotidiennement des « conspirations ».
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