PRÉCÉDENT

La Libre Parole, 28 février 1894

SUIVANT

URL invalide

La Libre Parole
28 février 1894


Extrait du journal

propositions précises, M. Lockroy a fourni au ministre de la guerre l’occasion de rem porter un facile succès. Tout autre eût été peut-être, pour le public sinon pour la Chambre, le résultat de cette discussion, si l’interpellateur, séparant nettement ses at taqués contre la marine, de la question de la défense des côtes dont elle n’est pas chargée, avait posé la question suivante : Est-il vrai que la place de Cherbourg soit sans défense sérieuse du côté de terre? Est-il exact qu’il existe autour du Cotentin, de nombreuses plages et un accès facile se lon les vents régnants, plages de grande étendue absolument sans défense, aborda bles cependant à moins de 1,800 mètres pour les plus grands navires. Est-il vrai que 30,000 hommes solidement établis dans l’isthme de Portbail et sur les lignes de Carentan, peuvent, avec l’arme ment moderne, assurer à un ennemi maî tre de la mer la possession de Cherbourg et de la presqu’île ? Les chemins de fer stratégiques qui de vaient assurer la rapide concentration des troupes sur les lieux de débarquement de l’ennemi, sont-ils construits et les voies ferrées existantes sont-elles suffisantes ? Où sont les troupes destinées à la défense mobile ; où sont les batteries montées et quel est leur calibre ? Quelles sont les divisions de réserve qui doivent appuyer, au besoin, la défense de cette partie du territoire ? M. le ministre de la guerre nous affirme qu’un simple télégramme suffira pour dire dans les différents chefs-lieux de corps d’ar mée : « Au lieu de diriger sur la frontière » deux, trois, quatre divisions, vous en gar» derezjune que vous concentrerez à tel en» droit », et cette division formera la dé fense mobile des côtes. SI ce plan est applicable à l’ensemble du littoral, il est inadmissible pour la pres qu’île du Cotentin, non seulement en rai son des difficultés de transport sur les voies qui la desservent, mais aussi et surtout parce qu’il est indispensable que les troupes soient préparées de longue main à opérer sur ce terrain spécial en vue d’un objectif nettement défini. En tout cas, l’horaire qui doit assurer l’arrivée des troupes de renfort par des voies qui à ce moment seront fort encombrées, est encore à établir aussi bien que l’organisation de ces troupes elles-mê mes. Nous ne croyons pas qu’on puisse aujour d'hui faire la guerre avec quelques chances de succès sans préparation. «Les légions qui » surgissent toutes armées, toutes comtnan» dées, toutes organisées et munies de tout » ce qui leur serait nécessaire pour dé» ployer et faire valoir les admirables qua» lités militaires de notre race », ces lé gions, disons-nous, ne s’improvisent pas. Il est plus que probable que devant des questions aussi précises, l’optimisme du mi nistre de la guerre eût quelque peu faibli. Il est impossible de nier l’évidence et de contester une situation que les étrangers connaissent aussi bien, sinon mieux que nous. Or, si l’on peut admettre, à la rigeur, la destruction par bombardement d’une de nos grandes cités commerciales, on ne saurait se résigner à la perspective de voir tomber aux mains de l’ennemi l’ad mirable position stratégique que présente Cherbourg et sa presqu’île. S’il est vrai que des officiers généraux de la Marine aient décliné la responsabilité de la garde de notre unique arsenal de la Manche dans les conditions actuelles, c’est qu’ils avaient sans doute de bonnes raisons pour cela ; cette démarche, imposée par le patriotisme, ne saurait passer inaperçue et l'heure est venue de connaître les motifs qui l’ont dictée. Du reste, en admettant la nécessité de construire à Portbail un ou vrage permanent « qui sera pour ainsi dire » la serrure de la porte dont nous aurons » la clé dans notre poche », M. le général Mercier reconnaît implicitement qno tout n’est pas parfait de ce côté de la frontière maritime. Aussi, sans insister plus long temps sur une situation dangereuse et triste, nous voulons espérer qu’on va enfin y porter remède. Le temps presse ! Patria...

À propos

Fondée par le polémiste Édouard Drumont en 1892, La Libre Parole était un journal politique avançant des prétentions « socialistes », quoique son anticapitalisme populiste marqué se nourrissait essentiellement de liens présumés entre le capital et la communauté juive. Le journal répandait un antisémitisme virulent à travers de brutales diatribes et des unes sensationnalistes dénonçant quotidiennement des « conspirations ».

En savoir plus
Données de classification
  • wilson
  • pourquery
  • péchard
  • carnot
  • grévy
  • gladstone
  • cavard
  • lockroy
  • guerre
  • cotentin
  • france
  • russie
  • lasserre
  • tombouctou
  • niger
  • venise
  • cherbourg
  • abraham
  • bismarck
  • portbail
  • l. w
  • la république
  • carnaval de venise
  • rothschild
  • droite