Extrait du journal

Veut-on un autre exemple prouvant combien sont dangereuses, pour la plus petite culture, les dispositions qu’on veut arracher au vote de la Chambre ? Voilà une année de sécheresse où le propriétaire, ne pouvant pas nourrir son bétail, est obligé de le vendre. C’est pour lui la ruine; il se prive de sa seule source de revenus ; il sera obligé de racheter plus tard à un prix élevé ce qu’il vend aujourd’hui à*vil prix. Il se trouvera avoir réalisé plus de 2,500 fr. Sa misère même sera la cause de son assujetissement à l'impôt. Ce qu’il y aura d’ailleurs de toujours vexatoire dans l’établissement du nouveau système, ce seront ces difficultés conti nuelles avec les agents du fisc pour l’appré ciation de votre revenu. Us viendront rechercher et estimer ce que vous aurez consommé, exercer chez vous une vérita ble inquisition, sans compter les dénoncia tions de voisins jaloux, disant que vous avez dissimulé et contre lesquels il faudra se défendre. N'est-ce pas une situation intolérable faite aux paysans de nos campagnes ? De quel prix leur fait-on acheter le prétendu dégrèvement qu’on fait miroiter à leurs yeux ? Mais une autre menace pèse encore ♦sur eux. La part de centimes communaux et départementaux prélevée actuellement sur la personnelle mobilière et les portes et fenêtres, il faudra bien la retrouver quelque part pour faire face aux dépenses de la commune et du département: à moins de maintenir partiellement les impôts qu’on supprime, c’est encore à la terre qu’on finira par s’adresser. En réalité, c’est elle qui fera tous les frais de l’expérience fiscale qu’on tente. Les titres au porteur et la plus grosse par tie de la fortune mobilière échapperont. Comme il faut se procurer les mêmes res sources, c’est sur le champ de Jacques Bonhomme que tout le poids retombera. Les capitaux se détourneront de la pro priété ; elle subira du fait des charges qui pèseront sur elles une forte dépréciation, et le cultivateur restera exposé aux vexa tions et aux tracasseries du fisc. Adrien BASTID....