Extrait du journal

J’ai assiste Vautre jour à une modotite cérémonie de village qui m'a (tomé beaucoup à penser. 1j6 Mis d'un gros cultivateur, après avoir été blessé une première fois en 10l5, a reçu, en avant du bois d’Avocourt, une balle qui lui c traversé la tète. Il en est resté aveugle,. C'était un très bon soldat qui s’était distingué f»ar son admirable conduite au feu, un d| ces solides Beaucerons du 6* corps, dis d’une race qui manifeste peu, mais qui « tient ». Ce jeune gar çon avait reçu la médaille militaire, mais l'examen de son dossier par la commission Fayolle lui a fait filiale ment décerner la Légion d'honneur. Hélas I cela ne compense guère —: ni la très modeste pension accordée — la perte de la vue et les hésitations de cerveau. Ce fils de cultivateurs se voit réduit à une quasi inactivité dont il souffre cruellement et dont on souffre autour de lui. Sa famille m’est depuis longtemps connue. Avant de pouvoir acheter la belle terre qu'il cultivait depuis tant d’années, le père a été fermier de ma famille. C’est, lui, un autre type de solide Français, de ces ' paysans de France qui sont vraiment l’assise de notre nation. Mais il est trop de .-a race de Beauce pour aimer le « flatta ». Il «?.vait conçu une cérémonie toute familiale dans la ferme qu’il a rache tée, où la croix eût été remise à son fils -.ors la phot< rapide de l’autre fils, tombé au champ d’honneur dès •oût 1914. Lee anciens combattants de la com mune ont réclamé. Ils voulaient que leur frère d’armes, martyr de la pa trie, reçût sa croix en pleine place publique du village, et le maire a appuyé leur requête, estimant comme eux que l’honneur rejaillissait sur tous les anciens combattants de sa commune. Cela déjà est très bien. Il y a là une très belle preuve de solidarité et de camaraderie « comme au front », sui vant la très expressive et très cordiale devise qu’ont adoptée nos Sociétés d’anciens combattants. Des sceptiques, des pessimistes eussent cru que l’en vie, la jalousie pourraient faire dire à certains de nos anciens combattants : « Pourquoi lui et pas moi " » Tout au contraire, ont-ils considéré qu’il leur revenait à chacun un peu d’honneur déc...