Extrait du journal

NOUVELLES PARLEMENTAIRES Versailles, 10 décembre. La plus vive émotion règne aujourd’hui dans tous les groupes parlementaires, et de Paris à Versailles les propos les plus divers vont bon train. En arrivant au palais, on nous cite ce mot de M. de Broglie, mot vraiment digne de passer à la postérité : « Je n’y comprends plus rien... On ne fait plus de politique de principes à présent ! » Le même M. de Broglie s’est aussi écrié avec un accent de désespoir : « C’est la République fondée pour toujours! » Toujours M. de Broglie, rencontrant un député autrefois de ses amis fidèles : — C’est la discipline seule qui peut nous sauver. L’autre, qu’on dit être M. Bidard, tenant un cra yon à la main, lui montre une liste : — En fait de discipline, moi j’efface les noms qui me déplaisent ! Et, d’un vigoureux coup de crayon, il biffe 'le nom de M. de Broglie... M. Buffet paraît sombre et consterné. M. de la Rochefoucauld se laisse aller à'dire dans la Galerie des Tombeaux : « Voilà ce que c’est que de nommer des nègres ! » Un député de la gauche, qui entend le mot, le re lève très vigoureusement, et quelques instants après, M. Lacascade, député de la Guadeloupe, vient lui-même demander une explication au dépu té blanc. M. de la Rochefoucauld déclare qu’il n’a eu au cune intention offensante pour la députation colo niale. Un mot un peu gaulois, mais authentique, vient d’être lancé en pleine buvette par M. Luro à M. de Cumont, qui commençait à se plaindre, lui aussi, que le monde fût renversé : — Monsieur, le roi Louis XV a retourné votre nom, et vous êtes en train de défaire son œuvre. LA SÉANCE. C’est encore le duc d’Audiffret-Pasquier qui oc cupe le fauteuil....