Extrait du journal
• Vous pourriez être étonné que nos pensées de prévoyance n'aient visé que la vieillesse ou le lendemain de la mort et aient négligé les secours aux malades, si nécessaires pour un personnel ouvrier. Mais la solidarité entre pa trons et ouvriers s’exerce encore dans la Mai son sous une autre forme. » Il existe déjA, et depuis long:temps, parmi nous, une œuvre qui répond entièrement à ce but particulier. Dans chacun de nos ateliers, nos ouvriers et ouvrières prélèvent chaque semaine, sur leurs salures, une faible cotiser tion. Ils forment ainsi un fonds avec lequel ils paient à leurs camarades malades les deux tiers du prix ordinaire de leur journée. A ce moment, la Maison intervient, et elle concourt pour moitié dans ce paiement. — Cette oeuvre, vous le voyez, est d’un fonctionnement très simple et très efficace; et de ce chef, les ou vriers et les patrons contribuent, chacun par moitié, pour une somme annuelle de deux mille francs environ. » Mes chers collaborateurs, » J’aborde maintenant l’objet spécial de cette réunion en vous annonçant que la somme vous revenant, d’après nos statuts, sur les bénéfices de l’année 1894, est de 20,377 fr. 25 c. » La répartition de cette année porte A 241.910 fr. 25 cent, le total des bénéfices répartis entre vous dans ces douze dernières années. » Ce n’est là qu'une faible part, comme je vous le disais 1 an passé, de la rémunération de votre travail ; car la masse des salaires et appointements payés au personnel de la Mai son pendant ces douze années atteint cinq millions. » Pour ce seul dernier exercice 1894, la Maison a payé à son personnel près de sept cent mille francs. » Le nombre de nos participants s'est encore accru : il est de 98 pour la première catégorie et de 78 pour la deuxième, soit 176 en tout, sur un total de 300 personnes employées dans la Maison. • Le nombre des participants ayant atteint 55 ans et entrés en jouissance de leurs rentes était de 40 au 31 décembre 1894, et le chiffre total des rentes qu’ils recevaient était del.617fr. » Vous voyez, Messieurs, que les versements faits depuis douze ans à la Caisse des retraites pour la vieillesse commencent à « faire des petits», comme disait le fabuliste. N'oubliez pas, je vous le répète de nouveau, que cette épargne ne portera vraiment tous ses fruits qu’aprês l’évolution d'un cycle complet, c’est-à-dire après trente ans, et, par conséquent, que pour les plus jeunes d'entre vous à l'époque où nous avons inauguré cette œuvre. » Mais les rentes déjà acquises ne sont pas les seuls bienfaits recueillis par notre person nel. Grâce à la sage disposition par laquelle nous avons réservé aux familles des partici§ants décédés le capital déposé, les heritiers es camarades que nous avons perdus depuis douze ans ont déjà reçu, de ce chef, 24,500 fr. Vous voyez si les veuves et les orphelins ont dû apprécier et bénir cette prévoyance bien faisante. » Pour accroître ces bienfaits du travail, de la prévoyance, de l’épargne, continuons à tra vailler en commun avec un zèle et un dévoue ment toujours croissants, et avec la même cordi tlité affectueuse qui a toujours régné entre nous et qui ne cessera jamais,.j'ensuis sûr, d’ê tre la caractéristique de la Maison. » Les bravos éclatent parmi nous; puis M. An dré Lebon prend la parole pour s'exprimer A peu près en ces termes : « Je suis heureux, au milieu de l’agitation de ces journées, de me trouver quelques instants en famille. J’ai été votre collaborateur : je vou drais être votre ami. Je sais, en effet, que! rôle a joué la Gironde dans l'avénement de la Répu blique ; j'ai pour M. André Lavertujon et pour M. uounouilhou le respect des jeunes républi cains pour les ouvriers de la prem ière heure (Applaudissements.) » Après la victoire, ces hommes ont associé tous leurs collaborateurs au succès de leur Maison. Il n'y a pas d’œuvre.en effet,qui puisse mieux qu’un journal affirmer l’union du travail et de l'intelligence. La typographie, le travail intelligent entre tous, réalise la pensée conçue par quelques-uns. » J ai collaboré à la Gironde sans signer, puis en signant. Eh bien ! permettez-moi de vous le dire, je préférais l’anonymat, où cette fusion du travail et de la pensée se fait plus large pour le but à atteindre. L’individu disparait devant la collectivité, devant le journal qui porte le drapeau de la République. » Je suis des vôtres ; le jour où j’ai dû adres ser ma démission à votre directeur, je lui ai demandé de me réserver un oreiller pour le jour où je serai disponible. Je serai heureux, alors, de reprendre parmi vous mon rang pour la lutte. » Mesdames et Messieurs, cette réunion est une fête de famille. (Juand je suis venu à Bor deaux, je n’ai apporté aucune des récompenses que les ministres ont l’habitude de distribuer dans leurs voyages. Cet honneur est réservé au président de la République,qui viendra bientôt. Mais j’ai cru devoir faire une exception pour vous, et j’apporte à trois des plus anciens et des plus fidèles serviteurs de la maison. Mm. Eogie, M. Chopis et M. Urugère, la ré compense des vieux ouvriers. Voici le diplôme et le ruban ; la médaille leur sera envoyée pro chainement. » Tandis qu’on fait une chaleureuse ovation aux médaillés, très émus, le ministre leur remet les diplômes et attache le ruban sur leur poitrine : « Avant de vous quitter, dit en terminant M. Lebon, laissez-moi vous dire que votre force est dans votre solidarité. Vous connaissez les résultats obtenus. Mais les sacrifices de vosf directeurs ne sont rien: il leur faut le concours énergique de vos bonnes volontés quotidiennes. •• Il faut maintenir les vieilles traditions de cette Maison. (Juand nous nous retrouverons, j’ai la confiance que sa réputation n’aura fait que grandir pendant mon absence. »...
À propos
Au début simple déclinaison à prix modique du journal La Gironde, La Petite Gironde devient de plus en plus autonome à la fin des années 1880, lorsque sa diffusion dépasse – et de très loin – celle de son vaisseau-mère pour atteindre les 200 000 exemplaires à l'orée de 1914. Centriste modérée à l'origine, sa ligne éditorialse se droitise au fil des ans, jusqu'à devenir proche de celle de L'Action française dans l'agitation de la Première Guerre mondiale. Sans surprise, le journal sera collaborationniste en 1940, puis interdit en août 1944.
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